L'opposition thaïlandaise fourbissait ses armes dimanche à la veille d'une vaste opération de «paralysie» de Bangkok destinée à forcer le gouvernement à démissionner.

Les manifestants, qui ont été jusqu'à plus de 150 000 dans les rues ces deux derniers mois, ont promis de prolonger leur opération de paralysie jusqu'à la «victoire».

Les autorités ont de leur côté prévenu qu'elles étaient prêtes à déclencher «l'état d'urgence» si des violences se produisent dans la capitale, où près de 20 000 policiers et soldats seront mobilisés.

Les manifestants rassemblaient leur équipement dimanche autour de leur principal point de ralliement avant se répartir vers les sept points stratégiques d'où ils prévoient de bloquer dès lundi la capitale.

Ils comptent fermer des carrefours majeurs, empêcher des responsables de se rendre sur leur lieu de travail et priver certaines administrations d'électricité.

«Nous espérons que tout changera pour le mieux demain (lundi). Le changement que nous appelons de nos voeux est que ce gouvernement mette un terme à sa corruption ou qu'il démissionne», a expliqué sur place Komol, un manifestant qui n'a pas souhaité donner son nom de famille.

Les protestataires réclament le départ du gouvernement de Yingluck Shinawatra, qui cristallise le ressentiment accumulé par l'opposition contre son frère Thaksin.

Celui-ci l'a précédée dans ses fonctions de premier ministre et continue de diriger le pays à travers elle malgré le coup d'État dont il a été victime en 2006, selon l'opposition.

De nombreux opposants rêvent de reproduire le scénario du putsch avec sa jeune soeur, en qui ils voient le prolongement du «régime Thaksin», synonyme selon eux de généralisation de la corruption entre autres maux.

Plus généralement, les manifestants veulent remplacer le gouvernement par un «conseil du peuple» non élu, ce qui suscite des craintes quant à leurs aspirations démocratiques.

Ils ont ainsi promis d'empêcher les législatives anticipées du 2 février, proposées par Yingluck comme une sortie de crise et dont le parti Puea Thai au pouvoir est donné gagnant.

Le Parti démocrate, principal parti d'opposition, qui soutient le mouvement, a, lui, claqué la porte du jeu démocratique, ses plus de 150 députés démissionnant en masse fin décembre avant d'appeler au boycottage du scrutin.

Plusieurs dizaines d'écoles resteront fermées lundi à travers la ville, qui reste marquée par la crise de 2010 quand des scènes de chaos avaient eu lieu dans le centre-ville, jusqu'à un assaut de l'armée contre des manifestants pro-Thaksin en clôture d'une crise qui avait fait plus de 90 morts.

L'opposition est accusée de chercher l'affrontement pour justifier un nouveau coup d'État dans un pays qui en a connu 18 en 80 ans, réussis ou non.

Selon un vice-premier ministre, Niwattumrong Boonsongpaisan, Yingluck Shinawatra a ordonné aux policiers et militaires de faire preuve de «la plus grande retenue» dans l'exercice de la force, accusant certains groupes liés aux manifestants de se munir d'armes à feu et de bombes artisanales.

Le leader des manifestants, Suthep Thaugsuban, a promis une mobilisation massive. «Un nombre important de gens de toutes les provinces s'associeront au blocage de Bangkok lundi 13», a-t-il lancé à ses partisans samedi soir.

En prévision de pénuries, l'ambassade des États-Unis a recommandé à ses concitoyens de stocker de la nourriture pour deux semaines.