Terrés dans des abris de bric et de broc ou sous des tentes, les habitants de Tacloban aux Philippines ont passé Noël sous une pluie battante, qui rappelle aux rescapés du typhon Haiyan la catastrophe de début novembre.

Malgré l'eau et la boue, des grappes d'enfants allaient de porte en porte pour réclamer des bonbons, une tradition locale pour le 25 décembre, ou demandaient en riant aux passants quelques piécettes.

Mais Susan Scala contemple la pluie le regard triste, sous une bâche goudronnée, dans un des campements érigés à Tacloban après la destruction de milliers de maisons lors du passage de Haiyan, l'un des typhons les plus violents à n'avoir jamais touché terre, le 8 novembre.

Son mari a été emporté par les flots, lorsque la tempête, accompagnée de vents dépassant les 300 km/h et de vagues géantes semblables à un tsunami, s'est abattue sur le centre de l'archipel.

«Je ne cesse jamais de penser à lui», déclare cette mère de cinq enfants.

Comme d'autres survivants du typhon, les pluies qui s'abattent sur Tacloban et les environs depuis la nuit, rendent Susan Scala nerveuse. «Cette pluie incessante me rappelle ce qui s'est passé (le jour du typhon)», dit-elle.

Haiyan a causé la mort de 6100 personnes et 2000 autres sont portées disparues. Une large majorité était de Tacloban, ou des environs.

Quelque 4,4 millions d'habitants ont vu leur logement détruit et vivent désormais dans des tentes et des refuges, installés par les organisations humanitaires ou les autorités, ou dans des bicoques construites de bric et de broc, avec des matériaux récupérés dans les ruines.

Un Noël triste

À Sagkahan, le port de Tacloban, Emiliana Aranza, une veuve de 67 ans, tient une petite échoppe devant le cabanon provisoire qu'elle a construit après Haiyan. Elle attrape quelques biscuits et bonbons dans un bocal de verre pour les donner aux enfants qui font leur ronde de Noël.

«C'est un Noël triste. Nous avons perdu notre maison et le gouvernement nous interdit de la reconstruire là où elle était, car c'est trop près du rivage», explique-t-elle à l'AFP.

«Mais il y a aussi beaucoup de raisons de rendre grâce à Dieu», ajoute cette habitante, dont les enfants et 13 petits-enfants ont tous survécu à la tempête et vivent à présent ensemble dans la cahutte.

«À cause du typhon, nous nous sommes rapprochés. Il n'y a plus de disputes idiotes», ajoute-t-elle.

Les Philippines sont le grand pays catholique d'Asie, héritage de siècles de colonisation espagnole (jusqu'à la fin du 19e) et l'Église continue d'exercer une profonde influence dans la vie quotidienne.

La famille a tenu à réveillonner pour célébrer la naissance de Jésus, même si le repas ne consistait que de riz et de sardines en boite, éléments de la ration alimentaire hebdomadaire remise par les associations caritatives et le gouvernement.

Mais Emiliana ne sait pas où elle trouvera l'argent pour reconstruire une maison ou envoyer les petits-enfants à l'école.

Dans le centre de Tacloban, Maria Meneses, 31 ans, fouille avec une dizaine d'autres habitants dans les poubelles d'un magasin. «C'est pour ma fille», dit-elle à l'AFP en glissant dans son sac une petite boite avec des bougies pour gâteaux d'anniversaire qu'elle a récupérée parmi les déchets.