Le procès de trois militants anticorruption chinois, accusés de «rassemblement illégal» pour avoir publiquement exigé plus de transparence sur les biens des dirigeants du pays, s'est ouvert mardi, selon un de leurs avocats.

Alors que le Parti communiste chinois (PCC) au pouvoir a orchestré ces derniers mois dans ses rangs une vaste campagne contre la corruption, le procès de Liu Ping, Wei Zhongping et Li Sihua témoigne de l'emprise très stricte que Pékin entend conserver sur les voix dissidentes.

Inculpés de «rassemblement illégal» après avoir, en avril, brandi une banderole appelant les responsables gouvernementaux à dévoiler leur patrimoine, les trois militants ont tous plaidé non coupable mardi, a déclaré à l'AFP l'un de leurs avocats.

Selon lui, l'accusation de «rassemblement illégal» est passible d'une sentence d'emprisonnement de 5 ans maximum.

La publication du patrimoine des hauts responsables serait une réforme cruciale en Chine où certains d'entre eux ont été accusés d'avoir profité de leur poste pour amasser une immense fortune, pour leur bénéfice ou celui de leurs proches.

Lors de l'audience mardi, «nous avons discuté des faits (concernant) l'accusation de rassemblement illégal, qui est un peu ridicule, puisqu'ils ont seulement pris des photos depuis un appartement», a souligné Si Weijiang, l'avocat de Liu.

«Cela est devenu une audience quasiment à huis clos, puisque seuls deux membres de leurs familles ont été autorisés à assister aux débats», a-t-il ajouté, estimant que le tribunal avait «violé les règlements sur la tenue de procès publics».

Contacté par l'AFP, le tribunal de la ville de Xinyu, dans la province centrale du Jiangxi, où comparaissaient les accusés, n'était pas joignable mardi pour des commentaires.

Prévu originellement il y a un mois, le procès avait été reporté après que les accusés eurent retiré tout mandat à leurs avocats, en signe de protestation contre l'attitude «illégale» de la cour, et notamment l'interdiction de faire comparaître certains témoins clefs de la défense.

Pu Zhiqiang, le nouvel avocat de Li Sihua, a accusé le tribunal d'avoir violé les règlements en vigueur en refusant d'admettre des témoins qui avaient pourtant été précédemment entendus au cours de la procédure.

Liu Ping, de son côté, est également inculpée «de rassemblement en vue de perturber l'ordre public» et de «pratique religieuse déviante pour saper l'ordre légal», selon Si Weijiang.

Arrêtée en mai, Liu, ancienne ouvrière de la sidérurgie âgée de 48 ans, est liée au «mouvement des nouveaux citoyens», un réseau informel de militants qui demandent des réformes du système judiciaire chinois, selon sa fille Liao Minyue.

Au moins 15 membres du même groupe ont été arrêtés ces derniers mois en Chine, selon l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW)

«Si la loi était vraiment respectée, cette affaire n'aurait jamais dû arriver jusqu'au procès. Je ne nourris donc aucun espoir sur l'équité du verdict», s'est désolée Liao Minyue.

Elle a indiqué que, à l'approche du procès, des policiers s'étaient postés près de sa maison, la suivaient lorsqu'elle sortait de chez elle, et que l'un d'eux avait même menacé de la battre.

«Tout verdict autre que l'acquittement minerait sérieusement la crédibilité de la volonté affichée par le gouvernement à combattre la corruption», a estimé HRW dans un communiqué.