Les chefs de la diplomatie et de la défense américains, John Kerry et Chuck Hagel, ont discuté jeudi à Tokyo avec leurs homologues japonais de la modernisation de leur alliance militaire, dans un contexte de tensions régionales croissantes.

Washington s'appuie largement sur son alliance avec le Japon, considérée par les deux ministres américains comme un «pilier de la sécurité» dans la région, pour mettre en oeuvre sa stratégie dite de «pivot» vers l'Asie.

Après avoir déposé une gerbe au cimetière national Chidori ga Fuchi à la mémoire des Japonais, civils et militaires tombés pendant la dernière guerre, John Kerry et Chuck Hagel ont retrouvé leurs homologues Fumio Kishida et Itsunori Onodera pour une réunion «2+2».

«Notre objectif est une alliance plus équilibrée et plus efficace, dans laquelle nos deux armées sont des partenaires complets, travaillant côte à côte et avec d'autres dans la région pour promouvoir la paix et la stabilité», a expliqué John Kerry.

Au coeur de ces discussions: la sécurité régionale, au moment où le Japon s'inquiète de la montée en puissance militaire, maritime notamment, de la Chine, et alors que l'aventurisme nucléaire nord-coréen demeure une préoccupation majeure tant pour la Corée du sud et du Japon, tous deux menacés par Pyongyang du feu nucléaire.

Pour M. Kerry la rencontre de Tokyo a posé «les fondements de la relation de sécurité entre les États-Unis et le Japon et pour cette région pour les 15 à 20 prochaines années».

Les deux pays sont convenus que le Japon allait «accroître son rôle» au sein de cette alliance. Dernièrement, le Premier ministre japonais Shinzo Abe, dont l'une des premières décisions a été d'augmenter le budget de la défense - une première depuis 11 ans - a clairement indiqué la volonté de Tokyo de jouer un rôle plus affirmé en matière de paix et de sécurité régionale, ce qu'il a appelé un «pacifisme actif».

Rappelant que le document régissant la coopération militaire bilatérale n'avait pas été révisé depuis 1997, John Kerry a souligné que «beaucoup de choses ont  changé» depuis lors, «avec de nouvelles menaces et des menaces d'un type différent».

Face à cette évolution, les deux pays ont évoqué leur coopération dans «des domaines stratégiques tels que l'espace et le cyber-espace», ainsi que «l'accroissement des capacités de défense contre les missiles balistiques».

Son homologue, Fumio Kishida, a souligné l'importance du lien américano-nippon «au moment où la situation sécuritaire dans cette région monte en intensité».

Son collègue de la défense, Itsunori Onodera, a été plus direct en évoquant «les menaces diverses de la Corée du Nord» et le fait que «des pays d'Asie ont des relations tendues avec la Chine, particulièrement sur des questions maritimes».

Depuis plus d'un an, les relations entre Pékin et Tokyo sont glaciales en raison d'un conflit territorial en mer de Chine orientale où la Chine revendique un petit archipel désert administré par le Japon sous le nom de Senkaku (Diaoyu pour Pékin).

Rappelant que le traité de défense mutuelle américano-japonais s'appliquait aux îles Senkaku, John Kerry a appelé «toutes les parties à ne s'engager dans aucune action unilatérale» qui remette en cause le statu quo.

Au plan bilatéral, Washington et Tokyo sont convenus d'installer au centre du Japon un second radar d'alerte et de suivi des missiles balistiques.

Jeudi, les deux pays se sont également entendus sur le départ vers d'environ 5.000 soldats américains stationnés sur l'île d'Okinawa après 2020 et le déploiement pour la première fois au Japon de «deux à trois» drones d'observation Global Hawk.

Signe de l'importance du Japon dans sa stratégie dite du «pivot» vers l'Asie Pacifique, Washington va également y déployer des avions d'observation maritime P-8 Poseidon dès décembre (une première hors des États-Unis) et de chasseurs F-35 à partir de 2017.

«Même si nous faisons face à des difficultés budgétaires à Washington, nous continuons à donner la priorité à l'Asie pour y installer les capacités militaires les plus avancées», a commenté un haut responsable américain.

Coïncidence, en marge de cette rencontre USA/Japon, un responsable américain a annoncé la tenue la semaine prochaine de manoeuvres conjointes des marines des deux pays ainsi que celle la Corée du sud, au large de la péninsule coréenne.

Si Tokyo et Séoul sont les deux plus fermes alliés des Américains dans la région, leurs relations sont toutefois mauvaises en raison, comme pour Pékin, d'un différend maritime.