Les producteurs d'huile de palme et les papeteries étaient samedi la cible d'accusations multiples quant à leur possible implication dans les feux de forêt en Indonésie à l'origine d'une pollution historique à Singapour, la cité État évoquant même des poursuites.

«J'ai demandé à l'Attorney-General (principal conseiller juridique du gouvernement) d'étudier ce que nous pouvons faire à Singapour s'il peut être prouvé que de telles sociétés ont contribué d'une manière ou d'une autre» aux incendies, a déclaré samedi à la presse le ministre singapourien des Affaires étrangères, K. Shanmugam.

«Nous ferons tout ce que nous pouvons», a-t-il ajouté, interrogé sur une possible implication de groupes singapouriens, très présents en Indonésie, dans les feux de forêt qui continuent à faire rage sur l'île indonésienne de Sumatra (nord-ouest), répandant un épais nuage de fumée sur la cité État de Singapour, toute proche.

Le ministre a appelé à une «action forte, ferme et efficace» contre les groupes éventuellement concernés, sans pour autant les nommer.

L'Indonésie, premier producteur d'huile de palme au monde, a identifié «14 sociétés impliquées», dont une Malaisienne, a indiqué à l'agence Antara le ministre indonésien de l'Environment, Balthasar Kambuaya, sans nommer de sociétés ni de secteur d'activité.

Une analyse par Greenpeace de données de la Nasa a montré que «des centaines de foyers d'incendie se situaient à l'intérieur de concessions d'huile de palme» détenues par des groupes indonésiens, malaisiens ou singapouriens, a indiqué l'organisation dans un communiqué.

«La moitié des foyers se situent dans des zones qui devraient être protégées par le moratoire indonésien» censé bannir toute coupe de forêts primaires, ajoute Greenpeace.

L'association écologiste indonésienne «Eyes of the Forest» (Les Yeux de la forêt), soutenue notamment par le WWF, a également pointé du doigt les plantations de palmiers, mais aussi les Indonésiens APP et April, qui comptent parmi les premiers groupes de papeteries au monde.

«Un nombre assez important d'incendies se sont produits sur des terrains détenus par APP and April», a indiqué Eyes of the Forest dans un communiqué.

Un haut conseiller de la présidence indonésienne, Kuntoro Mangkusubroto, a lui aussi pointé du doigt les papeteries. «Il est évident que les feux se situent dans des concessions détenues par APP et April», avait-il dit vendredi.

Contacté, l'indonésien Asia Pulp and Paper (APP) a assuré de sa bonne foi, disant respecter une «politique de zéro brûlis mise en place en 1996».

«Des vérifications sur le terrain n'ont révélé que sept foyers d'incendie, touchant 200 hectares environ. Cinq d'entre eux ont été allumés par la communauté locale tandis que les deux autres font encore l'objet d'une enquête», a indiqué APP dans un communiqué.

April a de son côté démenti toute responsabilité. «L'ensemble des feux (dans les terrains détenus par April, ndlr) trouve leur origine à l'extérieur de notre concession», a affirmé la société.

Depuis près d'une semaine, Singapour subit un pic de pollution historique, en raison d'un épais nuage de fumée en provenance de l'île indonésienne voisine de Sumatra. La qualité de l'air a atteint vendredi l'indice 400, un niveau «qui peut représenter une menace pour la vie des personnes âgées et des malades».

Samedi en fin de journée cependant, l'indice était retombé à 85 et le ciel bleu avait refait son apparition.

Pour tenter d'éteindre les feux, Jakarta s'apprêtait à ensemencer les nuages au-dessus des incendies, une technique visant à déclencher artificiellement la pluie.