L'artiste chinois Ai Weiwei, bête noire du régime communiste en Chine, a pour la première fois depuis la fin de sa détention donné une interview à un journal officiel, dans laquelle il semble comme par magie tempérer ses critiques du pouvoir.

Ai, qui avait qualifié de «gangsters» les dirigeants chinois et estimé que le régime en vigueur était «inhumain», a déclaré, selon le quotidien Global Times, exclure aujourd'hui de quitter la Chine de façon permanente.

«On ne résoudra pas les problèmes de la Chine en renversant le régime par une révolution radicale», a déclaré l'artiste contestataire dans cet entretien publié par le journal qui fait partie du groupe de presse du Quotidien du Peuple, organe officiel du Parti communiste chinois.

«Ce qui est le plus important, c'est un système politique scientifique et démocratique», a aussi dit Ai Weiwei en se gardant de toute critique directe du gouvernement actuel, selon le Global Times.

Ai Weiwei a été détenu au secret de début avril à fin juin en Chine, officiellement pour des infractions d'évasion fiscale, mais pour les défenseurs des droits de l'Homme il ne fait pas de doute que les autorités ont voulu isoler et tenter de dompter cet esprit trop libre.

«Personne n'est au-dessus de la loi», a déclaré au Global Times Ai Weiwei, qui fait toujours l'objet d'une enquête et n'a pas le droit de quitter sa ville de résidence, Pékin.

Cet entretien a été publié par la version anglaise du Global Times et non la version chinoise, signe que les autorités souhaitent toucher un public international après la vague d'indignation soulevée à travers le monde par l'arrestation d'Ai Weiwei.

L'article, qui mentionne par ailleurs que l'artiste dément avoir signé une «confession» de ses infractions présumées d'évasion fiscale, insiste longuement sur des faits reprochés à Ai Weiwei.

Il donne la parole à deux responsables de l'Académie chinoise des sciences sociales (CASS) qui appuient la thèse de sa culpabilité d'évasion fiscale.

Plus loin est cité un responsable du secteur des médias qui accuse Ai Weiwei d'avoir insulté la Nation dans une oeuvre où il posait dévêtu, et d'avoir violé la Constitution en mélangeant art et politique.

Libéré le 22 juin après quelque 80 jours de détention, l'artiste plasticien a diffusé mardi sur son compte Twitter des messages très critiques du régime. Il n'a pourtant pas l'autorisation d'utiliser ce réseau social par ailleurs censuré en Chine.

Dans un de ses «tweets» il évoque Liu Zhenggang, un de ses collaborateurs emprisonné en même temps que lui, en écrivant qu'il a «failli mourir» en détention.

Il dénonce aussi les «tortures physiques et mentales» subies par certains de ses proches collaborateurs, emprisonnés comme lui «de façon illégale».

Dans un autre message, il appelle à la libération de deux dissidents, Wang Lihong et Ran Yunfei. L'avocat de ce dernier a annoncé mercredi qu'il avait été libéré, après six mois de détention.