Le Parti communiste vietnamien (PCV) se réunit cette semaine pour désigner les dirigeants du pays pour les cinq ans à venir, alors que ses rêves de développement se heurtent à d'immenses difficultés économiques et qu'il reste sourd aux appels à la démocratisation.

Le pays, qui a embrassé progressivement l'économie de marché depuis le lancement des réformes de la «Doi Moi» (Renouveau) en 1986, veut devenir une «nation industrialisée et moderne» d'ici à 2020.

Mais il n'a vaincu ni les dernières résistances de l'ancien système socialiste, ni la corruption systémique, et encore moins l'omnipotence d'un secteur public souvent mal géré.

En dépit d'une croissance constante depuis vingt ans et établie à 6,8% en 2010, le pays affiche une inflation à près de 12%, une monnaie dévaluée trois fois depuis un an et un fort déficit commercial.

La mission officielle du parti unique «est de guider le pays dans tous les domaines». Mais l'impatience pointe chez certains Vietnamiens, après 25 ans de prudentes réformes qui ont surtout profité aux grandes villes.

«On ne voit rien changer de significatif», regrette Nguyen Quang A, qui a dirigé d'un institut de réflexion fermé sous la pression du pouvoir en 2009.

«La nouvelle équipe dirigeante, quelle qu'elle soit, n'aura d'autres choix que de pousser pour de plus amples réformes», estime pour sa part un diplomate asiatique.

Sur le plan politique, il n'est en revanche pas question de réformes. L'année 2010 a été marquée, comme tous les cinq ans, par le souci du pouvoir de faire taire toute voix dissidente.

Une source interne au PCV, représentative d'un courant de pensée important, réclame ainsi non pas le multipartisme, mais un peu de pluralisme au sein de l'appareil. «Ces gens se sont battus si longtemps, se sont tellement sacrifiés (...). Ils méritent des droits démocratiques», a-t-il souligné sous couvert de l'anonymat.

«Le marxisme, le léninisme et la pensée de Ho-Chi-Minh constituent la fondation idéologique et l'étoile guidant» le parti, proclament cependant des banderoles rouges dans la capitale.

Mais dans le vacarme des embouteillages et l'entrelacs des publicités pour des produits de luxe, la légitimité du parti a plus reposé ces dernières années sur sa capacité à assurer la croissance.

Définir une stratégie économique fait donc partie des objectifs majeurs du congrès. Une tâche complexe, quand la Banque mondiale souligne combien le Vietnam fait exception dans la région, dominée par «des monnaies fortes, de robustes entrées de capitaux et des réserves en hausse de devises étrangères».

Quant aux nouveaux leaders, ils ne seront dévoilés qu'en fin de congrès, le 19 janvier, après les féroces débats qui ont opposé dans la plus grande opacité clans et factions du parti.

Nguyen Tan Dung, 61 ans, Premier ministre depuis juin 2006, a toutes les chances de conserver son poste.

Il a certes été chahuté après la quasi-faillite du groupe public Vinashin, un conglomérat de construction navale endetté de 4,4 milliards de dollars, et par un projet d'exploitation de la bauxite confié à des entreprises chinoises.

Mais les analystes le voient sortir du congrès renforcé face à Truong Tan Sang, 61 ans, de facto numéro 2 du bureau politique sortant et qui hériterait du poste honorifique de président.

Le très conservateur et sino-compatible président de l'Assemblée nationale Nguyen Phu Trong, 66 ans, pourrait pour sa part conquérir le poste de secrétaire général du parti et numéro un officiel.

Mais au-delà des hommes, le pays changera peu, selon Carl Thayer, de l'université australienne de New South Wales. «L'ensemble du système du parti communiste a toujours été l'équilibre et la prudence».