Déjà sinistrés par les pires inondations de leur histoire, les Pakistanais doivent en plus subir l'envolée des prix alimentaires sur les marchés, après la dévastation de nombreuses récoltes sur les terres les plus fertiles du pays.

«Les routes sont fermées et les champs inondés. Cela se ressent terriblement sur les marchés», explique Amir Zada, 35 ans, qui vend des fruits et légumes sur un marché de Rawalpindi, près de la capitale Islamabad, devant une peu appétissante cargaison de pêches, d'abricots et de raisin envahie de mouches.

«Il y a des carences du côté des grossistes. Leurs prix sont en hausse et nous n'avons d'autre solution que de vendre plus cher», abonde un autre marchand de fruits, Ghulam Nabi.

Les fruits, les légumes et le blé sont surtout produits dans le bassin fertile du fleuve Indus dans les provinces du Pendjab (centre) et du Sind (sud), ainsi que sur les plaines de la Khyber Pakhtunkhwa (nord-ouest).

Autant de régions dévastées depuis deux semaines par les pluies torrentielles de la mousson qui ont affecté 15 millions de Pakistanais et décimé le cheptel.

Dans le seul Pendjab, les inondations et glissements de terrain qu'elles ont provoqué ont détruit 1,4 million d'acres (près de 570.000 hectares) de champs.

Alors que les survivants luttent pour survivre avec de maigres rations fournies par les élites locales et organisations de charité, en accusant le gouvernement de ne pas les avoir secourus plus tôt, les marchés se vident à travers le pays, même dans les villes les plus prospères.

«Tous les prix ont augmenté. Les légumes ne sont pas frais, et les fruits de piètre qualité», fulmine Shahida Begum, femme au foyer à Rawalpindi. «J'avais l'habitude de nourrir ma famille avec 500 roupies (4,4 euros) par jour. Aujourd'hui je dois payer plus du double pour les fruits et légumes. Cela est trop cher pour moi», dit-elle.

À Rawalpindi, l'ail au kilo est passé de 120 à 260 roupies, les tomates de 40 à 120 roupies, les petites pois de 70 à 130 roupies, les abricots de 70 à 150 roupies....

Et la situation est encore pire dans la Khyber Pakhtunkhwa, déjà secouée depuis plusieurs années par la sanglante rébellion des talibans.

«Nous estimons que les inondations ont causé plus de six milliards de roupies (52,5 millions d'euros) de pertes dans les zones fertiles. Les récoltes, légumes et vergers ont été dévastés», a déclaré à l'AFP le ministre provincial de l'Agriculture, Arbab Mohammad Ayub Jan, ajoutant: «Cela va avoir un effet très négatif sur les marchés. Les prix sont déjà très élevés».

Toujours dans le nord-ouest, les habitants des districts de Swat, Dir, Charsadda et Nowshehra ont indiqué à l'AFP avoir dû déjà payer 1.200 à 1.500 roupies (10,5 à 13,1 euros) un sac de 20 kgs de farine lors de la première semaine des inondations. Il coûtait auparavant 550 roupies.

Les coûts du transport salent encore plus l'addition dans les grandes villes telles que Peshawar, capitale de la Khyber Pakhtunkhwa, remarque Bashir Ahmad Bilour, un haut responsable provincial.

Dans le Pendjab, où les prix ont été multipliés par trois, de nombreux magasins étaient fermés, a constaté un journaliste de l'AFP.

«Il n'y a plus de carburant dans les stations essence. Il y a moins de fruits et légumes, et les prix se sont envolés», note Mohammad Khaled, un habitant de Kot Addu, une zone en grande partie noyée par les inondations.

Mohammad Riaz, un négociant de Lahore, capitale du Pendjab, confirme lui aussi l'envolée des prix. Et prévient: «Les gens vont commencer à pleurer si la situation ne change pas».