Des vidéos d'ébats amoureux entre vedettes du show-business mettent en émoi depuis trois semaines l'Indonésie où un vaste débat s'est engagé sur la moralisation de la société à l'heure de l'internet triomphant.

L'arrestation mardi d'un célèbre chanteur est le dernier épisode de ce scandale qui concurrence la Coupe du monde à la Une des journaux depuis début juin. Nazril Ariel, vedette du groupe de rock Peterpan, est la principale «vedette» de vidéos, pas très nettes, qui le montrent en train de faire l'amour avec deux célèbres présentatrices de télévision, sa compagne Luna Maya, 26 ans, et une ancienne petite amie, Cut Tari, 32 ans, actuellement mariée.

Le chanteur, âgé de 28 ans, a été interpellé par la police qui le soupçonne d'avoir violé la loi bannissant la production et la dissémination d'images à caractère pornographique.

S'il est reconnu coupable, il est passible d'une peine de prison de six mois à douze ans et d'une forte amende.

Traqués par les paparazzis, Nazril Ariel et sa compagne Luna Maya se défendent en se disant victimes de vidéos truquées qui ont fait dérailler leur carrière, notamment en leur faisant perdre des contrats publicitaires depuis que le scandale a éclaté.

Mais les enquêteurs sont soumis à une forte pression de la part des autorités, préoccupées par ce scandale inédit dans le pays musulman le plus peuplé au monde.

Le pouvoir a d'abord tenté, sans grand succès, de freiner le retentissant succès des vidéos en luttant contre leur propagation à grande échelle via l'internet, twitter, e-mail et DVD pirates. Des raids policiers ont ainsi été menés dans des écoles afin de s'assurer que les élèves ne les avaient pas téléchargées sur leurs téléphones portables.

Le président Susilo Bambang Yudhoyono est ensuite intervenu pour mettre en garde contre le danger potentiel des nouvelles technologies dans «une société ouverte» comme l'Indonésie. «Nous prenons conscience que notre pays ne peut rester démuni et être submergé par la fièvre technologique, car il y aura de nombreuses victimes», a-t-il déclaré à la presse.

Le ministre de la Communication, Tifatul Sembiring, élu d'un parti islamique, a été plus loin en affirmant que l'internet était «susceptible de détruire notre nation».

Il a donc annoncé que des mesures allaient être prises d'ici la fin de l'année pour renforcer le contrôle des «contenus négatifs» des sites web, suivant ainsi le souhait des principales organisations musulmanes du pays.

Mais la tâche s'annonce difficile car douze ans après l'avènement de la démocratie, les Indonésiens ont pris goût à la liberté d'expression, désormais bien établie.

L'indonésien est devenu la langue asiatique la plus utilisée sur Facebook, qui compte plus de 20 millions d'abonnés dans l'archipel, selon une récente étude de la société Inside Network.

Ces derniers mois, plusieurs campagnes impliquant des dizaines de milliers d'internautes ont été menées, avec succès, pour venir en aide à une mère de famille menacée de prison pour avoir critiqué un hôpital, ou soutenir deux responsables de la lutte anti-corruption injustement mis en cause.

Des sites de soutien à Ariel ont été lancés sur Facebook ou Twitter. Un message posté mardi regrettait que «la police soit toujours championne lorsqu'il s'agit d'arrêter des personnes dans des affaires comme celle-ci. Mais quant à arrêter des corrompus...»