Quelque 35 000 manifestants, selon la police, ont encore encerclé jeudi le siège du pouvoir à Bangkok pour exiger le départ du Premier ministre Abhisit Vejjajiva qui, lui, a commencé à distribuer des «chèques-cadeaux» aux Thaïlandais les plus démunis face à la crise mondiale.

Comme lors de précédents défilés antigouvernementaux, les «chemises rouges» - surnom des partisans de l'ancien homme fort de la Thaïlande Thaksin Shinawatra - se sont d'abord rassemblés dans un parc avant de se diriger vers le complexe abritant les bureaux de M. Abhisit, qu'ils ont rapidement assiégé en dépit d'importantes mesures de sécurité.Scandant «va-t'en», «va-t'en», des manifestants ont utilisé deux grues pour dégager des conteneurs mis en place par la police pour bloquer des avenues menant à «Government House», selon une journaliste de l'AFP.

Les partisans de M. Thaksin, renversé en 2006 par des généraux royalistes, ont déjà encerclé plusieurs fois le siège du gouvernement depuis l'arrivée au pouvoir, il y a à peine plus de trois mois, de M. Abhisit qui a systématiquement rejeté leurs demandes en vue d'élections anticipées.

«Aujourd'hui, nous n'avons qu'un objectif qui est de renverser ce gouvernement», a déclaré Jatuporn Prompan, un des leaders des «chemises rouges».

M. Thaksin, homme d'affaires de 59 ans qui s'est enfui à l'étranger pour échapper à une condamnation à deux ans de prison pour corruption dans son pays, a remercié les manifestants grâce à une liaison de quelques minutes par téléphone.

Il a indiqué qu'il ne pouvait pas parler plus longtemps car il était en voyage, sans dire dans quel pays il se trouvait. Il a promis à ses partisans qu'il continuerait à s'adresser à eux vendredi et samedi, les appelant ainsi à poursuivre la manifestation.

Environ 6000 soldats et plus de 2000 policiers avaient été déployés pour garder le siège du pouvoir, autour duquel des barbelés ont été déroulés.

«Je suis sûr que le gouvernement n'aura pas à décréter l'état d'urgence mais, quoi qu'il arrive, nous sommes prêts à faire face» à la situation, a dit le Premier ministre après être allé distribuer des «chèques-cadeaux» à des personnes à faibles revenus pour les aider à faire face à la crise économique.

Le gouvernement Abhisit a lancé cette opération jeudi et, théoriquement, quelque 10 des 65 millions de Thaïlandais doivent bénéficier de ces chèques, d'un montant unitaire de 2000 bahts (42 euros), qui sont aussi destinés à «stimuler» la consommation intérieure.

Des opposants ont affirmé que les «chemises rouges» n'avaient aucunement l'intention de s'inspirer des actions des «chemises jaunes», mouvement royaliste rival qui avait pris d'assaut et occupé pendant trois mois en 2008 le siège du gouvernement, alors que des lieutenants de M. Thaksin étaient revenus au pouvoir, à la faveur d'élections.

Les «chemises jaunes» avaient également forcé la fermeture en novembre dernier des deux aéroports de Bangkok, et leur action n'avait pris fin qu'après une décision de la Cour constitutionnelle, qui avait abouti à l'éviction du gouvernement pro-Thaksin, en décembre.

M. Abhisit, 44 ans, a ensuite été élu Premier ministre par le Parlement à la faveur d'un renversement d'alliance politique, mais les «chemises rouges» affirment que son arrivée au pouvoir n'a pas été démocratique et qu'il est la «marionnette» de la puissante armée thaïlandaise.

Samedi dernier, M. Abhisit et cinq de ses ministres ont survécu sans difficulté à une motion de censure, déposée par l'opposition, à l'issue de deux jours de débats parlementaires autour de nouvelles accusations de corruption.