Dans l'État de Victoria, le plus touché par les incendies qui font rage en Australie, la scène est la même partout. Les gens sont à l'extérieur: dans leur jardin ou en bordure de la route. Ils surveillent l'horizon. D'imposantes colonnes de fumée s'élèvent dans le ciel.

À Healesville, à une centaine de kilomètres au nord-est de Melbourne, les hélicoptères des services d'incendie font des allers-retours entre le lac le plus proche et les flammes qui sont à quelques centaines de mètres des résidences. Depuis deux jours, la population est en état d'alerte.

 

Craig Scaan, qui habite depuis quelques jours au centre d'accueil d'urgence de Healesville, vit un cauchemar. Il a échappé aux flammes de justesse samedi, lorsque le vent a tourné et a complètement rasé sa maison. «En moins de deux ou trois minutes, tout était parti en fumée. Nous n'avons même pas eu le temps de penser à sauver quoi que ce soit.»

Une autre journée d'angoisse pour la population, une autre nuit de patrouille pour les milliers de pompiers, de policiers, de militaires et de volontaires. Il y a maintenant deux semaines que les incendies de forêt les plus meurtriers de l'histoire du pays font rage, mais de nombreux Australiens n'en sont pas à leur dernière nuit blanche.

Victoria Conrad est mère célibataire. Elle a décidé de quitter sa maison avec son jeune garçon. «Le feu était à moins d'un kilomètre de chez moi. J'ai fait mes valises et je suis partie.» Si Victoria a décidé de partir avant l'avis d'évacuation des autorités, plusieurs décident de rester et de défendre ce qu'ils ont jusqu'au bout.

C'est le cas de bien des résidants de Kinglake, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Melbourne, où au moins 35 personnes ont été tuées lorsque les flammes ont complètement détruit la petite ville. Seuls quelques bâtiments isolés ont survécu à ce mur de feu d'une hauteur de plus de 10 m qui avançait à toute vitesse et qui a surpris tout le monde.

L'effet d'une bombe

Brandon Cole a combattu les flammes pendant plus de six heures pour sauver sa maison. Armés d'un arrosoir de jardin, de seaux d'eau et de serviettes humides, les membres de la famille Cole, aidés de plusieurs voisins, ont réussi à arrêter les flammes à quelques mètres à peine de leur maison. La grange, les voitures, le garage, le jardin, tout a été détruit. Il ne reste qu'un énorme cerne noir qui s'étend sur des centaines de mètres autour de la maison et qui donne l'impression qu'une bombe nucléaire a comme par hasard épargné la maison.

Mais pour la famille, c'était plus qu'un logis qui était en jeu, explique M. Cole, qui a été brûlé au visage, aux bras et aux jambes. «Nous n'avons jamais pensé à partir. Nous serions morts sur le chemin.»