Le pape François a réduit vendredi à l'état laïc Fernando Karadima, un ancien prêtre charismatique chilien condamné pour pédophilie, une affaire qui avait empoisonné le voyage du chef de l'Église catholique au Chili en janvier.  

« Le Saint-Père a pris cette décision exceptionnelle en conscience et pour le bien de l'Église », a expliqué le Vatican dans un communiqué.  

Fernando Karadima, qui vient d'être défroqué à l'âge de 88 ans, avait été condamné par la justice chilienne pour des actes de pédophilie en 1980 et 1990. Mais les affaires avaient été classées pour cause de prescription.  

Parallèlement, il avait aussi été condamné en 2011 par la justice religieuse à se retirer pour « une vie de prière et de pénitence » à l'issue d'une procédure canonique au Vatican.  

C'est cette procédure que François a complétée en alourdissant la peine à son niveau maximal, par un décret signé jeudi et notifié vendredi à l'intéressé, qui est « dispensé de toutes ses obligations ecclésiales », n'a plus le droit de dire la messe ou d'administrer les sacrements.  

« Nous étions face à un cas très grave de pourriture et nous devions l'extirper », a pour sa part insisté le directeur de la salle de presse du Vatican, Greg Burke, dans un commentaire explicatif.  

« C'est sans aucun doute une décision exceptionnelle, mais les crimes graves de Karadima ont causé des dommages exceptionnels », a-t-il ajouté, décrivant le décret comme un « pas supplémentaire dans la voie empruntée par le pape contre les abus ».  

Le pape François agit « en tant que pasteur, en tant que père, pour le bien de tout le peuple de Dieu », a-t-il souligné.  

En avril 2011, l'Église du Chili avait demandé pardon pour toutes les agressions sexuelles d'enfants commises par des membres du clergé et pour son manque de réactivité.  

L'affaire était cependant revenue au premier plan en 2015 avec la décision de François de nommer Mgr Juan Barros évêque d'Osorno alors qu'il était soupçonné d'avoir couvert les agissements de Fernando Karadima.  

Au cours de sa visite au Chili en début d'année, le pape argentin avait d'abord pris la défense de Mgr Barros, réclamant « des preuves » de son implication, avant de présenter ses excuses et d'engager l'Église du Chili dans une vaste opération de remise en question.  

Fin avril, François avait longuement reçu au Vatican trois victimes de Fernando Karadima, avant de convoquer mi-mai tous les évêques du Chili pour trois jours de réflexion, à l'issue desquels ils avaient tous remis leur démission.  

Depuis, le pape a accepté sept de ces démissions, dont celle de Mgr Barros et de plusieurs évêques directement soupçonnés d'agressions sexuelles.  

« Le pédophile Karadima expulsé du sacerdoce », s'est réjoui sur Twitter Juan Carlos Cruz, l'une des victimes de l'ex-prêtre reçues par le pape. « Je n'aurais jamais pensé voir ce jour. Un homme qui a ruiné la vie de tant de gens. Je remercie le pape d'avoir finalement pris cette décision. J'espère que de nombreux survivants ressentiront un léger soulagement aujourd'hui ».  

Les enquêtes judiciaires pour agressions sexuelles présumées commises par des membres de l'Église sur des mineurs et des adultes depuis les années 1960 se multiplient au Chili depuis la visite du pape et sont actuellement au nombre de 119.  

Mais le Chili n'est pas, tant s'en faut, le seul pays touché. Mardi, l'Église allemande a présenté ses excuses après les révélations sur des sévices sexuels dont plus de 3600 mineurs ont été les victimes pendant des décennies.