L'opposition vénézuélienne entamait mardi une nouvelle étape capitale vers le référendum contre le président Maduro, au lendemain du feu vert du Conseil national électoral (CNE) à cette consultation populaire, qui reste menacée par de nombreuses procédures.

Vent debout depuis des mois contre le président Nicolas Maduro, les antichavistes (du nom de l'ex-président Hugo Chavez, 1999-2013) cherchent par tous les moyens à le destituer, car ils le rendent responsable des pénuries alimentaires et de la situation de plus en plus chaotique du pays.

Ce pays, qui dispose des plus grandes réserves de pétrole du monde, subit de plein fouet la chute des cours du brut.

Réunis au sein de la coalition de la Table de l'unité démocratique (MUD, centre droit), qui détient la majorité au Parlement, les opposants au chef de l'État exigent d'ici à fin 2016 un référendum révocatoire à son encontre. Le dirigeant socialiste, successeur d'Hugo Chavez, a été élu en 2013 pour un mandat qui court jusqu'en 2019.

Tant pour l'opposition que pour le gouvernement, le calendrier du référendum est crucial. Une destitution du président avant le 10 janvier 2017 ouvrirait la voie à de nouvelles élections. Mais si la consultation se déroule après cette date et si le chef de l'État est battu, il pourra désigner son vice-président pour le remplacer.

La date du 10 janvier 2017 correspond au début de la quatrième année de mandat de l'ex-président Hugo Chavez, décédé en 2013, que Nicolas Maduro est en train de compléter.

Après avoir recueilli près de deux millions de signatures pro-référendum, dont seules 1,3 million ont été validées par le CNE, au moins 200 000 signataires devaient confirmer leur choix, en personne, fin juin.

C'est sur ce point précis que le CNE a donné son feu vert lundi soir. Après une période d'audit qui a duré un mois, 399.412 signatures ont été validées, soit le double du minimum requis. 

«Retarder le référendum révocatoire» 

Avant de passer à l'étape suivante, qui consiste cette fois à recueillir 4 millions de signatures en faveur du référendum (soit 20% de l'électorat), plusieurs formalités doivent être remplies.

Mardi à la mi-journée, l'autorité électorale, que l'opposition accuse de jouer le jeu du gouvernement, a délivré à la MUD le document certifiant le franchissement de la première étape.

L'opposition a ensuite demandé formellement au CNE de fixer les dates de la dernière phase, proposant que celle-ci se réalise du 23 au 25 août. L'organisme a 15 jours pour répondre.

«Il y a largement le temps pour faire le référendum cette année», a assuré le dirigeant d'opposition Carlos Ocariz face aux journalistes.

Un des leaders de l'opposition, Henrique Capriles, a annoncé des mobilisations dans tout le pays mercredi et jeudi «en faveur des 20%».

«Le pas suivant sera aussi difficile et long que le premier. Potentiellement, le jeu du CNE n'est pas d'éviter mais de retarder le référendum révocatoire. Et ce jeu n'est pas fini», juge l'analyste Luis Vicente Leon, président du cabinet Datanalisis.

Pour destituer Nicolas Maduro, le «oui» devra dépasser son score à la présidentielle de 2013 (7,5 millions de voix). Selon un sondage de l'institut Venebarometro, 64% des Vénézuéliens (soit quelque 12 millions) voteraient pour le départ du président.

En face, le camp gouvernemental semble avoir lancé une offensive judiciaire sur tous les fronts.

Nicolas Maduro lui-même a intenté un recours pour fraude devant le Tribunal suprême de justice (TSJ), que l'opposition accuse également d'être au service de l'exécutif. Au total, environ 8.600 recours ont été déposés devant le parquet et le TSJ.

Les chavistes ont aussi demandé au CNE d'invalider la coalition d'opposition en tant que parti. Ils lui reprochent des «fraudes» pendant la collecte des premières signatures pro-référendum, une «stratégie politique pour faire durer le processus du référendum» selon Eugenio Martinez, expert en matière d'élections.

La tension est montée d'un cran ces derniers jours, lorsque le Parlement contrôlé par l'opposition a réintégré trois de ses députés, dont l'élection avait été suspendue par le TSJ pour fraude supposée.

Le président Maduro, qui ne s'était pas encore exprimé sur l'avancée du référendum, a accusé lundi soir l'opposition de «coup d'État parlementaire contre le pouvoir judiciaire».