Le président américain Barack Obama s'apprêtait dimanche à tourner une page historique en se rendant à Cuba, un des derniers bastions du communisme avec lequel il entend mettre fin à plus de cinq décennies d'antagonisme.

Parti de Washington peu après 13h30, le président américain était attendu vers 17h à l'aéroport Jose Marti de La Havane.

Barack Obama deviendra le premier dirigeant américain en exercice à venir sur l'île depuis Calvin Coolidge, en 1928.

Accompagné de son épouse Michelle et de leurs deux filles Malia et Sasha, il se déplace avec un double objectif: aller à la rencontre du peuple cubain et consolider le spectaculaire rapprochement engagé fin 2014 avec le président Raul Castro.

Au moment de boucler son second mandat, M. Obama souhaite réussir un «coup» diplomatique et avancer le plus possible sur le dossier cubain afin de compliquer tout retour en arrière, quel que soit son successeur en 2017.

Dans le même temps, il a souhaité donner des gages à ces concitoyens en programmant pour mardi une rencontre avec des dissidents et a prévenu qu'il évoquerait «directement» les droits de l'homme lors de ses entretiens lundi avec Raul Castro, qui a succédé à son frère Fidel voici presque 10 ans.

Sur ce thème, les autorités cubaines ont donné le ton dimanche en arrêtant plusieurs dizaines de dissidents lors de l'habituelle procession dominicale des Dames en Blanc près d'une église de l'ouest de La Havane.

Les policiers présents sur place n'ont pas souhaité fournir d'explications à l'AFP sur les motifs de ces arrestations, qui se soldent généralement par des libérations quelques heures plus tard.

À son arrivée dimanche, le président américain doit faire étape à l'ambassade, puis rejoindre la vieille ville en longeant le Malecon, boulevard de bord de mer le long duquel de nombreux Cubains devraient se masser pour voir passer sa limousine blindée.

Dans la soirée, il doit parcourir à pied les rues de la vieille Havane, classées au patrimoine de l'UNESCO et toilettées pour l'occasion, puis rencontrer le cardinal Jaime Ortega, un des artisans du rapprochement américano-cubain.

Le retour des multinationales à Cuba

Le temps fort de la visite du président américain sera le discours qu'il prononcera mardi dans un théâtre de La Havane, devant un public soigneusement sélectionné et les caméras de la télévision cubaine.

Samedi, le président Obama a surpris les Cubains en se prêtant au jeu d'un petit sketch avec le célèbre humoriste cubain Panfilo. Mise en ligne par l'ambassade américaine, la vidéo a été diffusée dans la soirée par la télévision d'État, provoquant l'étonnement de nombreux Havanais.

Dans la capitale cubaine, si l'effervescence est palpable, beaucoup de Cubains ayant grandi pendant la guerre froide, bercés par les diatribes anti-impérialistes de Fidel Castro, peinent encore à réaliser que l'impossible est en passe de se produire.

«Un président des États-Unis à Cuba (...) probablement accueilli avec des sourires, des applaudissements et des groupes musicaux! Jamais dans nos rêves ou nos cauchemars nous n'imaginions voir quelque chose de tel de notre vivant», confie l'écrivain Leonardo Padura dans le blogue d'informations Cafefuerte.

En revanche pas de rencontre prévue entre Barack Obama et Fidel Castro, âgé de 89 ans, si l'on en croit la Maison-Blanche.

Si les médias cubains ont pour l'instant accordé une maigre couverture à cette visite, les drapeaux américains ont fleuri ces derniers jours dans les rues de la capitale.

«Bien-sûr qu'on lui souhaite la bienvenue!», clame Reinaldo Peres, serveur de 42 ans dans le centre de La Havane. «Je pense qu'il devrait emménager ici. Donnez-lui une maison!», rigole-t-il, illustrant le capital de sympathie dont jouit le président américain à Cuba.

Malgré l'engouement autour de ce déplacement longtemps impensable, l'embargo imposé à l'île depuis 1962 reste en place et les changements espérés par Washington pourraient tarder à se concrétiser.

Jeudi, le ministre cubain des Affaires étrangères a rappelé que La Havane n'était pas disposée à «renoncer à un seul de ses principes (...) pour avancer vers la normalisation».

De son côté, la Maison-Blanche a décrété ces derniers mois une série de mesures pour assouplir l'embargo, dont la levée totale dépend du Congrès.

Et ces mesures commencent à porter leurs fruits. La chaîne hôtelière Starwood a annoncé samedi avoir obtenu le feu vert du Département du Trésor pour ouvrir deux hôtels à La Havane, devenant ainsi la première multinationale américaine à s'installer à Cuba depuis la révolution castriste de 1959.