Le Congrès chilien a approuvé mardi un premier texte visant à dépénaliser l'avortement en cas de risque pour la vie de la mère, de malformations ou de grossesse issue d'un viol, dans un pays où l'interruption de grossesse est totalement interdite.

Par 8 votes pour et 5 contre, une commission parlementaire a accepté de légiférer sur le projet de loi, soumis au Congrès le 31 janvier dernier par la présidente socialiste Michelle Bachelet.

Le texte devra être voté en séance plénière avant d'être examiné article par article.

La procédure qui a été précédée d'interventions de médecins et de responsables politiques a été suivie devant le Congrès qui siège à Valparaiso, à une centaine de kilomètres de la capitale, par des militants en faveur de l'avortement et des opposants au projet de loi.

«Je vote en faveur de ce projet, car dans des situations dramatiques, il permet aux femmes de définir ce qui va se passer» avec leur vie, a expliqué la députée Cristina Girradi, du Parti pour la Démocratie (PPD), qui fait partie de la coalition gouvernementale.

Cette première approbation du texte est nécessaire pour légiférer sur un thème de société particulièrement polémique au Chili, un des pays les plus conservateurs d'Amérique latine, où le divorce n'a été approuvé qu'en 2005 et où plus de 70% de la population se déclare catholique.

Le général Augusto Pinochet, au pouvoir entre 1973 et 1990, a totalement interdit l'avortement en 1989 juste avant de quitter le pouvoir.

Auparavant, l'interruption de grossesse avait été possible pendant 50 ans en cas de foetus non viables et de dangers pour la santé ou la vie de la mère.

Cette interdiction totale a été maintenue depuis le retour de la démocratie en 1990 sous la pression de l'Église catholique.

«Les faits ont montré que l'interdiction totale et la criminalisation de toute forme d'interruption de grossesse n'ont pas empêché ni n'empêchent sa pratique dans des conditions de haut risque pour la vie et la santé des femmes», avait déclaré Michelle Bachelet, médecin de formation et ancienne responsable d'ONU-Femmes, lors de la présentation du projet de loi.

L'avortement thérapeutique nécessitera le diagnostic d'un médecin, entériné par un autre praticien. L'avis d'un seul suffira si la femme court un risque imminent.

Le projet de loi reconnaît aux médecins le droit à l'objection de conscience.

En tel cas, la patiente sera orientée vers un autre médecin par son centre de santé.

Quelque 16 510 femmes sont chaque année hospitalisées au Chili pour des grossesses de moins de 22 semaines présentant un danger pour leur vie ou parce que le foetus souffre de malformations incompatibles avec la vie.

Il n'existe aucune donnée concernant les grossesses consécutives à un viol ou sur le nombre d'avortements clandestins.