Deux semaines après sa capture retentissante, la guérilla des FARC s'apprête à relâcher un général dimanche en Colombie, un épilogue très attendu pour renouer les pourparlers de paix bloqués par les autorités.

Une mission humanitaire doit récupérer cet officier supérieur de 55 ans, Ruben Alzate, ainsi qu'un caporal et une conseillère de l'armée, enlevés lors d'une mission le 16 novembre par les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) dans la province du Choco, sur la côte Pacifique.

Présent sur place depuis deux jours, le général Jaime Lasprilla, commandant de l'armée nationale, a donné «la garantie au pays et aux Colombiens» que «toutes les conditions étaient réunies» pour les libérations promises par la rébellion marxiste.

Les opérations militaires ont été suspendues dans cette région très pauvre et difficile d'accès avec des cours d'eau serpentant entre les forêts et une météo souvent capricieuse.

Les FARC, qui considèrent l'absence de soldats comme une «condition indispensable», ont annoncé dès samedi avoir «activé le protocole humanitaire» pour l'opération placée sous l'égide du Comité international de la Croix rouge (CICR), avec des représentants de Cuba et de la Norvège, pays garants du processus de paix.

Véritable choc en Colombie, l'enlèvement du général, plus haut gradé tombé aux mains de la guérilla en un demi-siècle, a interrompu le dialogue lancé dans l'espoir de mettre fin au conflit le plus ancien d'Amérique latine avec 220 000 morts et 5,3 millions de déplacés, selon des chiffres officiels.

Forte de 8000 combattants repliés dans des zones rurales, la principale rébellion a déjà fourni une preuve de bonne volonté en relâchant mardi deux jeunes soldats, retenus depuis le 9 novembre à la suite d'affrontements dans le nord du pays.

Processus de paix «pris en otage»

La résolution de la crise «est très rapide et plus fluide qu'autrefois», signale à l'AFP la politologue Angelika Rettberg, professeur à l'Université des Andes de Bogota, auteur du livre «Construction de la paix en Colombie».

«Il faut y voir le fait que chacun des camps veut continuer le processus de paix et éviter une escalade de la crise», ajoute-t-elle.

Le retour du général et ses accompagnateurs constitue la dernière condition, posée par le président Juan Manuel Santos pour autoriser le retour d'une délégation à La Havane, où sont délocalisées depuis deux ans les négociations, sans cessez-le-feu en Colombie.

Aucune date n'a été toutefois été précisée pour la reprise des discussions dans la capitale cubaine.

«Il est difficile que le processus de paix puisse se rétablir comme si rien ne s'était passé», a indiqué à l'AFP Christian Voelkel, expert en Colombie auprès de l'association Crisis Group International.

Selon le représentant de cette ONG, spécialisée dans la résolution des conflits dans le monde, «cet épisode se fera sentir à long terme à La Havane».

Cette semaine, le dirigeant suprême des FARC, connu sous le nom de guerre de Timoleon Jimenez, a laissé entendre que la restauration du dialogue pourrait encore prendre du temps, reprochant au chef de l'État d'avoir «pris en otage» le processus de paix.

La rébellion, qui présente comme un «geste» la libération de ceux qu'elle qualifie de «prisonniers de guerre», a aussi profité de cette crise pour alerter l'opinion sur la condition des guérilleros «qui pourrissent dans les prisons».

L'opposition au dialogue avec les FARC pourrait en outre gagner du terrain auprès des Colombiens, toujours perplexes sur les circonstances de la capture du général, qui circulait en civil et sans escorte.

Avant même son retour à la liberté, ce dernier a déjà été convoqué par le Congrès pour s'expliquer sur cette apparente violation des règles élémentaires de sécurité.