Quatre personnes en garde à vue ont répondu lundi de la cascade de négligences à l'origine de la tragédie de la discothèque incendiée au Brésil, où les familles ont enterré leurs morts à 500 jours du coup d'envoi du Mondial de football.

Les enquêteurs de Santa Maria (sud) tentent de démêler l'écheveau des responsabilités dans le drame de la discothèque Kiss, où des centaines d'étudiants ont été pris au piège d'un nuage de fumée toxique provoqué par un spectacle pyrotechnique pendant un concert. Bilan : 231 morts.

La police a placé en garde à vue l'un des deux propriétaires, ainsi que deux membres du groupe de country brésilienne qui se produisait dans la discothèque : le chanteur, qui, selon les témoins, a provoqué l'incendie en jetant un feu de Bengale, et le responsable de la sécurité du groupe.

Dans l'après-midi, le second patron de la discothèque, également visé par un mandat d'arrêt, s'est livré à la police.

«Nous pensons que la cause la plus plausible de l'incendie est l'engin pyrotechnique utilisé par le groupe, qui aurait mis le feu au plafond», a déclaré à l'AFP le commissaire de police Sandro Meinerz.

Pendant sa garde à vue, l'un des patrons du Kiss a reconnu que sa licence était périmée depuis août, tout en ajoutant qu'il avait demandé son renouvellement, selon la police.

Il a accusé le groupe musical d'être responsable de la tragédie.

Ce dernier a enfin nié avoir ordonné aux vigiles du Kiss de bloquer la sortie de la discothèque au début du drame, et d'avoir retiré du local l'ordinateur disparu sur lequel sont enregistrées les images des caméras de sécurité de la discothèque, selon le commissaire Meinerz.

Cette accumulation pose fatalement la question de la sécurité des lieux publics au Brésil, qui s'apprête à accueillir des événements majeurs : Coupe des Confédérations en juin, Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) en juillet en présence du pape Benoît XVI, Mondial-2014 de football et Jeux Olympiques deux ans plus tard à Rio.

Le Comité olympique international (CIO) et la Fédération internationale de football (Fifa) ont cependant assuré n'avoir aucun doute sur la sécurité des Jeux et du Mondial.

La tragédie de Santa Maria «n'a rien a voir avec la sécurité des stades pendant la Coupe des Confédérations et du Mondial, a notamment affirmé le secrétaire général de la Fifa, Jérôme Valcke.

«Nous avons un plan d'urgence pour évacuer un stade entier en l'espace de huit minutes», a-t-il fait valoir.

«Nous ne doutons pas que Rio 2016 saura offrir un environnement sûr aux fans, athlètes et personnes travaillant pour les Jeux», a pour sa part affirmé le CIO.

«Pourquoi? Pourquoi?»

Mais des experts interrogés par l'AFP, pensent que, si la sécurité des enceintes sportives n'est pas en cause, les «contrôles de sécurité sont très fragiles» dans les lieux de grande affluence au Brésil et que des mesures s'imposent.

Le présidente Dilma Rousseff a exhorté lundi soir les maires du Brésil «à prendre l'engagement que jamais une telle tragédie ne se répètera», sans toutefois évoquer des mesures concrètes.

A Santa Maria, et dans d'autres villes de la région, des familles ont enterré toute la journée leurs proches tués dans la tragédie.

Lundi soir, plusieurs milliers de personnes ont défilé en silence dans les rues de Santa Maria pour réclamer justice au nom des victimes de l'incendie.

Le cortège s'est arrêté devant la discothèque Kiss: les manifestants se sont assis dans la rue, observant une minute de silence, avant de hurler «justice, justice, justice!» et de lâcher des ballons blancs.

«Je sais bien que ma fille ne reviendra pas, mais il faut que quelqu'un paie pour tout ça», a clamé Jorge Neves, père d'une des victimes.

Dans l'un des quatre cimetières de Santa Maria, qui ne désemplissait pas, résonnaient également les plaintes de parents éplorés, selon des journalistes de l'AFP sur place.

«Pourquoi? Pourquoi?», se lamentait Juliana, inconsolable de la mort de son frère, Heitor Oliveira, appuyée au bras de sa mère qui la suppliait d'accepter la tragédie.

Contrôles à Sao Paulo

Brasilia a décrété un deuil de trois jours dans le pays et tous les drapeaux ont été mis en berne.

Le pape Benoît XVI a fait parvenir à l'archevêque de Santa Maria, Mgr Helio Adelar Rubert, un télégramme de condoléances, se disant «consterné par la mort de tant de jeunes gens» et demandant de faire savoir aux familles «sa solidarité spirituelle».

Sur les 116 blessés, 80 restaient hospitalisés dans un état grave, dont 14 grands brûlés admis à Porto Alegre, la capitale du Rio grande do Sul, selon le ministre de la Santé, Alexandre Padilha.

«Soixante-quinze patients risquent de succomber» à leurs blessures, a-t-il souligné.

Les autorités de Sao Paulo ont annoncé qu'elles procéderaient à l'inspection de toutes les salles de spectacles et discothèques de cette mégalopole du sud.