Les obstacles à la relance d'Haïti sont nombreux. Pourtant, le pays retrouve graduellement un semblant de normalité, trois ans après le séisme meurtrier de 2010. Voici cinq raisons d'espérer que les choses continuent de s'améliorer.

La fin des débris

Vrai, le patrimoine bâti de la capitale haïtienne garde encore des cicatrices du séisme, mais la très grande majorité des structures dangereuses et apparentes ont disparu et les routes sont dégagées. Le terrain du célèbre palais national est lui aussi vide depuis le 10 décembre dernier grâce à l'organisation humanitaire de Sean Penn. L'ONG de l'acteur et ambassadeur itinérant d'Haïti affirme avoir déplacé à elle seule plus de 300 000 m3 de débris depuis le séisme. La cathédrale de Port-au-Prince, l'un des derniers grands bâtiments encore en ruine, devrait être reconstruite sous peu. «La nouvelle cathédrale sera un symbole d'espoir pour ceux qui souffrent», a déclaré Mgr Jean Zaché Duracin.

Des sinistrés relogés

Il y a maintenant un parc pour enfants au centre du Champ-de-Mars, où s'entassaient encore près de 5000 familles l'année dernière. Des arbres ont été plantés et une couche de peinture appliquée ici et là. L'ancien coeur socioculturel de Port-au-Prince semble retrouver sa vocation originale. La grande majorité des places publiques transformées en camps après le séisme ont bénéficié d'opérations de relogement et de revitalisation similaires. Il y a maintenant moins de 400 000 personnes dans les camps, selon le Bureau haïtien du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. C'est encore trop, mais c'est un progrès notable par rapport à la situation il y a trois ans. Quelque 1,5 million de personnes s'y trouvaient alors. «On a enfin reçu nos cartes d'identification», a expliqué cette semaine à La Presse le père de famille Jean-Fritz Thomas, qui habite le plus grand camp de la capitale, sur le site d'un ancien aéroport de Port-au-Prince. Quelque 36 000 habitants y ont été dénombrés par l'Organisation internationale de la migration (OIM) à la fin de l'été. «On pense être relogés dans des appartements bientôt», espère-t-il.

L'énergie solaire mise à profit

Des lampadaires à énergie solaire ont été installés par centaines dans de nombreux camps de déplacés afin d'améliorer la sécurité. Il y a maintenant de tels lampadaires, indépendants du réseau électrique, à des milliers d'endroits au pays, tant dans des quartiers populaires comme Cité-Soleil que dans des régions reculées. En plus d'améliorer la sécurité, ils permettent par exemple à des milliers d'étudiants de profiter de la lumière malgré les fréquentes coupures de courant. La majorité de ces lampadaires sont fabriqués par une entreprise haïtienne.

L'école gratuite

Le président Michel Martelly n'a pas attendu qu'une loi soit votée. Dès son élection, en 2011, il a retardé d'un mois la rentrée scolaire afin d'appliquer un décret présidentiel qui assure l'école gratuite à près de 1 million d'enfants, comme le rappellent plusieurs panneaux publicitaires le long des routes. La mesure a été financée a posteriori par une nouvelle taxe de 0,5 cent par appel interurbain vers Haïti. Le Conseil national des télécommunications vient d'annoncer que ce programme a permis de recueillir 36,5 millions de dollars depuis 18 mois.

L'entraide et la solidarité

Le système de justice haïtien est en déroute, les infrastructures du pays mal en point, tout comme les institutions étatiques. Pourtant, le taux de criminalité est l'un des plus bas des Antilles. Très organique, la société ne sera jamais structurée à l'occidentale, mais l'une des grandes forces des Haïtiens est leur capacité de se prendre en main sans compter sur les structures collectives de l'État. Les voisins surveillent votre maison et la protègent contre les voleurs, les chauffeurs gardent leur calme sur les routes accidentées, l'économie souterraine fonctionne à fond de train. «À l'arrivée des fêtes patronales, par exemple, les gens s'organisent entre eux, dans les villages particulièrement, pour nettoyer les rues», explique à La Presse le jeune auteur Marvin Victor, qui rédige actuellement son deuxième roman pour Gallimard.