Quelque 250 policiers appuyés de blindés et d'hélicoptères ont investi mardi une favela de la banlieue nord de Rio de Janeiro, où au moins 12 personnes ont été tuées en trois jours, pour expulser les trafiquants de drogue et reprendre le contrôle de la zone.

Les corps de six jeunes de 16 à 19 ans ont été retrouvés lundi, deux jours après leur disparition, criblés de balles et lacérés de coups de couteau dans la favela de Chatuba (municipalité de Mesquita, région métropolitaine de Rio).

«Ces jeunes venaient de la favela voisine dominée par une faction rivale et ils ne pouvaient pas entrer ici. Mais ils sont allés se baigner dans la cascade et ont été pris par des membres du Comando Vermelho (CV) qui les ont torturés et exécutés», a déclaré à l'AFP Priscilla, une habitante de Chatuba.

Sans donner son nom de famille «par peur de représailles», cette veuve et mère à 26 ans de trois enfants, se plaint de «l'abandon» de la communauté depuis que les autorités de Rio ont engagé en 2008 une course contre la montre pour «pacifier» les favelas de la zone sud et touristique à l'approche du Mondial-2014 de football et des Jeux Olympiques de 2016.

Après l'expulsion des trafiquants, des «Unités de police pacificatrices» (UPP) ont été mises en place dans 144 des 750 favelas de la ville avec un total de 5500 policiers, mais la plupart dans les favelas situés près des beaux quartiers.

«Depuis la pacification des favelas en bas (zone sud) ça a empiré ici (zone nord)», souligne Priscilla qui énumère aussi le manque de médecins dans le poste de santé, le manque de crèches, d'écoles et de squares pour les enfants.

«Dimanche, la mère d'un des jeunes disparus a été trouvé un trafiquant pour avoir des nouvelles de son fils et il lui a répondu qu'elle ferait mieux d'en faire un autre», a ajouté Ana Paula, 29 ans, qui se félicite de l'installation prochaine d'une UPP à Chatuba.

«Les trafiquants de Rio sont arrivés ici»

«Face au nombre significatif de crimes barbares commis par des trafiquants de drogue qui dominent Chatuba (...), une action urgente était nécessaire pour ramener la tranquillité dans cette zone», a indiqué le secrétariat à la sécurité publique de Rio. L'occupation sera «permanente» et elle prépare le terrain à l'installation d'un bataillon permanent de 112 policiers.

La police recherchait mardi le corps d'un septième jeune de 19 ans. En trois jours au moins 12 personnes ont été tuées, selon elle.

Deux hélicopères survolaient en permanence les collines boisées de Chatuba où les trafiquants ont pris la fuite tandis que voitures et motos de police sillonaient les rues de la communauté où l'on pouvait notamment lire sur les murs «Si tu passes, tu meurs!», signé CV.

Les services de renseignements ont confirmé à la police que les crimes ont été commandités par le chef du trafic de Chatuba.

Le maire de Mesquita, Artur Messias, a affirmé à la presse que la violence avait augmenté au cours des dernières années dans cette ville de 40 000 habitants.

«Nous avons remarqué que la violence a augmenté avec la présence de trafiquants qui ont migré de Rio, d'où ils ont été expulsés. Le gouverneur (de Rio) et la direction de la police sont au courant», a dit le maire.

«J'habite ici depuis 1986 et ce n'était pas comme ça avant. Cela a empiré quand les trafiquants de Rio sont arrivés ici», a abondé José Aldeci da Silva Junior, 44 ans, père du jeune dont la police recherche le corps, cité par le site G1 du journal O Globo.

La police a lancé un appel à la «collaboration» de la population locale pour «dénoncer les criminels, leurs cachettes et les endroits où ils entreposent leurs armes, la drogue et autres produits illégaux».

Dix personnes ont déjà été arrêtées dans le cadre de cette opération et de la drogue, des armes et des antennes de transmission radio ont été saisies.