Après avoir réussi à faire élire sa dauphine Dilma Rousseff, Luiz Inacio Lula da Silva dispose d'un énorme capital politique qu'il devait mettre au service de sa protégée, mais aussi de ses ambitions personnelles, estiment des analystes.

Secrétaire général des Nations Unies, président d'une fondation ou ambassadeur de la plus grande économie latino-américaine sont quelques unes des éventualités mentionnées parmi les spéculations sur l'avenir du président brésilien sortant.

Cireur de chaussures et vendeur de cacahuètes quand il était enfant, ouvrier tourneur puis leader syndical pendant les grandes grèves des métallurgistes contre la dictature, homme politique... sa vie déjà a eu de multiples facettes.

Que fera donc Lula le 1er janvier, quand il abandonnera le pouvoir à l'âge de 65 ans?

Il a écarté dimanche toute participation à un éventuel gouvernement de sa protégée Dilma Rousseff qu'il avait choisie pour lui succéder: «il n'y a aucune possibilité qu'un ex-président participe à un gouvernement. Dilma, si elle est élue, devra former un gouvernement qui aura son image».

Selon des confidences de ses proches conseillers au quotidien Estado de Sao Paulo dimanche, Lula va «savourer» les deux derniers mois de pouvoir qui lui restent.

«Je sais qu'un jour, je vais finir par réaliser que je ne suis plus président», a confié Lula cette semaine. Et lors de récentes cérémonies publiques aux airs d'adieu, il a eu souvent les larmes aux yeux.

«J'ai déjà la nostalgie et je pense à ce que je vais faire», avait-il dit en juin dernier. Il avait alors minimisé son influence future: «je vais vouloir prendre un bain de mer, boire une petite bière (...) Un fils de Dieu a le droit de boire une petite bière glacée à la plage».

Mais les analystes de la politique brésilienne ne voient pas ce dirigeant charismatique, avec une popularité de plus de 80%, se retirer de la vie politique où il est présent depuis plus de 30 ans.

«Lula pourrait profiter de son prestige comme représentant informel du gouvernement mais tout dépendra de ce qu'il veut faire, de ses plans, et cela dépendra aussi de ce que veut Dilma», estime le politologue Guilherme Carvalhido, de l'Université Veiga de Almeida de Rio de Janeiro.

Le sociologue social-démocrate Bolivar Lamounier, a résumé l'avenir de Lula dans une interview au quotidien économique Valor: «Lula sera une espèce de guide, hors du gouvernement. Il ne restera pas à Sao Bernardo do Campo (où il vit, à Sao Paulo). Tout le monde est de cet avis».

Le meilleur atout de Lula est sans doute son talent de négociateur. «Il est avant tout un grand négociateur (...) Il s'agit d'un capital politique dont le gouvernement de Dilma ne peut pas se priver», a estimé Cesar Carvalho, analyste politique du consultant CAC.

Même si ses initiatives diplomatiques ont parfois fait l'objet de critiques, sa stature hors des frontières est telle que son départ de la présidence a déclenché une vague de rumeurs sur un possible avenir international.

«J'ai lu un article qui disait que je voulais être nommé à l'ONU ou à la Banque Mondiale. C'est une bêtise. L'ONU ne peut pas avoir comme secrétaire général une personnalité forte, il faut que ce soit un bureaucrate. En ce qui concerne la Banque mondiale, je n'ai pas une tête de banquier», a dit Lula lors d'une interview à la télévision publique.

En dépit de sa popularité record, la Constitution - qu'il a toujours refusé de modifier - interdisait à Lula de briguer un troisième mandat consécutif. Mais, en 2014, rien ne l'empêcherait de tenter de récupérer son fauteuil au Palais du Planalto à Brasilia.