L'ex-ministre de la Défense colombien Juan-Manuel Santos, connu à l'étranger pour ses succès face à la guérilla des Farc a emporté dimanche l'élection présidentielle, un scrutin démontrant la préférence des Colombiens pour la politique de fermeté à l'égard de celle-ci.

Selon des résultats portant sur 99,8% des bulletins dépouillés, Juan-Manuel Santos, candidat du parti social d'union nationale (Partido de la U), a obtenu 69% des suffrages avec neuf millions de voix.

«Une fois de plus merci à Dieu, merci à la Colombie. Merci pour la confiance que neuf millions de Colombiens nous ont témoignée en dépit d'une pluie torrentielle et des matchs de football», a déclaré Juan-Manuel Santos devant des milliers de partisans rassemblés dans une salle de spectacles de Bogota.

Son rival, à qui il a rendu hommage en indiquant qu'il ne renonçerait pas à l'intégrer dans un «gouvernement d'unité nationale», l'ex-maire de Bogota Antanas Mockus, âgé comme lui de 58 ans, a pour sa part obtenu 27,5% des voix, avec quelque 3,5 millions de votes.

Juan-Manuel Santos, trois fois ministre (Commerce extérieur, Trésor et Défense) n'avait jamais auparavant eu de mandat électif.

Il était cependant auréolé de victoires sur la guérilla des Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie, marxistes), à commencer par le sauvetage le 2 juillet 2008 lors de l'opération militaire Jaque de 15 de ses plus précieux otages, dont la franco-colombienne Ingrid Betancourt, qui fut l'une de ses collaboratrices lorsqu'il était ministre du Commerce extérieur.

«Le temps des Farc est compté», a-t-il dit, provoquant les hourras de ses partisans. «Nous continuerons à les affronter avec toute la dureté et la fermeté», nécessaires, a-t-il promis en appelant la guérilla à libérer tous ses otages immédiatement, «de manière unilatérale».

Dimanche, beaucoup avaient estimé que cette journée était «historique», tant les huit ans au pouvoir du président sortant ont marqué le pays.

Il va «terriblement» nous manquer, a ainsi déclaré Tulio A. un électeur de 82 ans, à l'AFP.

Huit ans après l'élection d'Alvaro Uribe, les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes) sont encore actives sur près de 50% de territoire, mais ne cernent plus les villes.

Les forces de l'ordre - police et armée - ont elles vu leurs effectifs doubler, passant de 220 000 hommes à 425 000. Cette politique a permis à Tulio A, comme à beaucoup de Colombiens, de pouvoir à nouveau sortir de Bogota sans craindre les enlèvements.

«Pendant deux ans, je n'ai plus pu aller (dans ma finca, ndlr). Ils avaient la liste des propriétaires terriens et les enlevaient» sur la route, raconte-t-il. Et, puis, ajoute cet électeur de Juan-Manuel Santos, «Uribe est arrivé»: «maintenant je peux y aller et il n'y a plus ni guérilla ni paramilitaires».

Alvaro Uribe a rapidement félicité son successeur, lui disant par téléphone qu'il priait Dieu «pour qu'il offre tous les succès à vous et votre famille», selon la présidence.

Son rival Antanas Mockus, qui avait un temps suscité une vague d'adhésions auprès de Colombiens en accord avec sa dénonciation des violations des droits de l'Homme, de la «culture du narcotrafic», de la corruption et la violence, a également reconnu sa victoire.

«Je veux féliciter Santos, son parti et les personnes qui ont voté pour lui», a déclaré l'ex-maire de la capitale (1995-97 et 2001-2003).

La Commission européenne, dans un communiqué signé de Jose Manuel Durao Barroso, son président, a également félicité le futur président colombien.

Le scrutin a cependant été entaché par une certaine violence, avec onze policiers et soldats tués dans différentes attaques dont les auteurs n'ont pas été identifié.

Sept policiers ont notamment été tués dans le département Norte de Santander, situé à la frontière vénézuélienne, dans une embuscade menée à l'aide d'un engin explosif, selon la responsable de la sécurité de ce département, Margarita Silva.