Le gouvernement cubain de Raul Castro a maintenu jeudi son refus de rejoindre l'Organisation des États américains (OEA) malgré la «grande victoire» qu'il affirme avoir obtenue sur Washington avec la levée, la veille, de 47 ans de suspension à son encontre. 

«C'est une grande victoire pour l'Amérique latine, les Caraïbes et aussi pour le peuple de Cuba», a déclaré à la presse Ricardo Alarcon, président du Parlement et figure importante du Bureau politique du Parti communiste, seul parti autorisé sur l'île.

Interrogé sur un éventuel changement de la position cubaine à l'égard de l'OEA, il a répondu: «ce qui s'est passé ne modifie en rien ce que Cuba pensait hier, avant-hier et aujourd'hui».

L'île communiste a déjà maintes fois assuré qu'elle n'accepterait pas de réintégrer l'OEA, accusée par Fidel Castro, le Père de la Révolution de 1959 qui a cédé le pouvoir en 2006 à son frère Raul, d'avoir été «complice de tous les crimes commis par les États-Unis» en Amérique latine.

Les 34 pays membres de l'OEA ont réussi à trouver mercredi un consensus pour lever sans condition la suspension de Cuba qui avait été prise en 1962, en pleine guerre froide entre Moscou et Washington.

«Que l'Amérique latine et les Caraïbes aient réussi à convaincre les autres d'accepter que le monde a changé ne devrait pas susciter une grande émotion, mais malheureusement l'histoire de ce continent a été telle que cela est vraiment une victoire très importante», a estimé M. Alarcon.

L'OEA laisse à Cuba l'initiative d'ouvrir ou non la procédure pour son retour qui devrait se faire dans le respect des «principes» de l'organisation qui défend notamment la démocratie et le pluralisme politique.

La secrétaire d'État américaine Hillary Clinton avait estimé mercredi que le consensus trouvé représentait un «succès» pour la diplomatie américaine qui a promis une «nouvelle ère» dans ses relations avec l'Amérique latine.

L'administration de Barack Obama a envoyé des signes de détente à La Havane en assouplissement ces derniers mois des mesures de l'embargo controversé en vigueur depuis 1962 contre Cuba. Les États-Unis restent le seul pays du continent à ne pas avoir normalisé leurs relations avec Cuba.

Granma, l'organe officiel du Parti communiste, titrait à sa Une jeudi: «Fidel et le peuple cubain ont été acquittés par l'histoire!».

Le journal faisait référence à la fameuse formule «l'Histoire m'acquittera!» lancée par Fidel Castro devant le tribunal qui le jugeait pour l'assaut raté de la Caserne Moncada en 1953 à Santiago de Cuba (sud-est).

«Même si les États-Unis ont essayé de l'empêcher, le thème de Cuba a occupé toute l'attention des chefs d'État et de la diplomatie assistant à la réunion de l'OEA, et Washington n'a eu d'autre choix que de finalement respecter la décision adoptée sans condition aucune», s'est réjoui Granma.

À La Havane, les gens affichaient jeudi leur satisfaction mais certains se disaient plus préoccupés par les problèmes récurrents du quotidien, comme le manque de moyens de transports dans la ville, que la décision de l'OEA ne «va pas changer», selon Isabel Hernandez.

«Ce ne sont que des mots parce que Cuba avait déjà dit qu'il ne voulait pas retourner dans l'OEA» même si cette dernière lui ouvrait la porte, estime cette retraitée de 64 ans.

Nora Fernandez, une avocate de 40 ans, espère elle que cette décision de l'OEA va contribuer «à améliorer le choses» sur l'île où le salaire moyen est de 20 dollars par mois.

«Je fais plus confiance en la solidarité de l'Amérique latine et aux pressions qu'elle exerce qu'à un grand changement de la part des États-Unis», dit-elle.