Le président bolivien Evo Morales a cessé mardi une grève de la faim de cinq jours, après avoir arraché au parlement une loi électorale, et annoncé dans la foulée le lancement de la campagne pour l'élection présidentielle de décembre, dont il sera favori.

M. Morales a promulgué à la mi-journée la loi qui régira les élections présidentielle et législatives du 6 décembre, un texte enjeu d'un bras-de-fer au parlement depuis une semaine. L'opposition de droite, craignant un scrutin irrégulier, se battait pour obtenir des garde-fous.

«Un autre jour inoubliable, une autre date mémorable», a lancé le président à la mi-journée, à plusieurs milliers de sympathisants issus des communautés indiennes et du monde ouvrier, rassemblés sur la place d'armes de La Paz, près du parlement.

«Nous lançons la campagne» électorale, a aussitôt annoncé le chef de l'Etat, fixant à ses partisans du Mouvement vers le socialisme (MAS) l'objectif d'entre 60 et 70% des voix aux législatives. «Et il n'est pas impossible d'arriver à 90%», a-t-il ajouté.

Champion autoproclamé de la cause indigène et de l'anti-libéralisme, le socialiste Morales, premier président amérindien (aymara) de Bolivie, sollicitera un deuxième mandat de cinq ans, jusqu'en 2015.

A l'aube, Pedro Montes, un des 14 dirigeants syndicaux qui accompagnaient M. Morales dans son jeûne au Palais présidentiel, avait annoncé, sitôt la loi électorale adoptée au Congrès: «Nous arrêtons à ce moment notre grève de la faim».

Les tractations entre parlementaires, retardant la loi, avaient conduit le chef de l'Etat a lancer sa grève de la faim pour faire pression sur les législateurs, dénonçant l'obstruction de l'opposition - «la droite oligarchique et putschiste», a accusé mardi le vice-président Alvaro Garcia.

Dans l'immédiat, l'adoption de la loi dégage l'horizon du chef de l'Etat.

D'abord parce que les élections auront lieu à la date prévue. Ensuite parce qu'il a tenu la scène médiatique pendant cinq jours par son jeûne, imité - selon des chiffres du pouvoir - par quelque 2.000 sympathisants à travers le pays. Une action ponctuée de messages de solidarité de ses alliés du continent, tels le président vénézuélien Hugo Chavez et le leader historique cubain Fidel Castro.

M. Morales apparaît favori logique du scrutin, dans la lignée de ses victoires à deux référendums depuis un an (67% en août, près de 62% en janvier sur la Constitution).

En face, l'opposition conservatrice, ancrée dans les provinces prospères de l'est et du nord, partisane d'une autonomie face aux régions défavorisées des Andes, n'a pas pour l'heure, à huit mois du scrutin, fait émerger un leader capable de rivaliser avec l'aura d'«Evo».

Mais l'opposition a elle aussi marqué des points avec la nouvelle loi.

Elle a obtenu un nouveau registre électoral actualisé, biométrique, qu'elle réclamait, arguant de nombreuses irrégularités dans le registre existant.

Elle a aussi réussi à limiter le nombre de sièges réservés aux minorités indigènes: sept (sur 130), au lieu des 14 voulus par le pouvoir, et qui, selon la droite, conféraient un avantage aux partisans de M. Morales.

L'opposition a donc peut-être créé les conditions pour contenir la prévisible victoire de la majorité aux législatives, et de demeurer un contre-pouvoir à l'image de son contrôle actuel sur la Chambre haute.

La loi électorale fixe aussi au 6 décembre la tenue simultanée d'un référendum sur une gestion décentralisée dans cinq des neuf régions du pays. Quatre autres s'étaient déjà prononcées.