Il y eut des moments d'espoir, puis l'angoisse, puis la joie encore : pour les proches des otages de la guérilla colombienne des Farc, la reprise entachée d'une polémique, dimanche, des libérations unilatérales a été une épreuve éreintante.

Plus d'un mois après l'annonce le 21 décembre par la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes) de son intention de libérer six de ses 28 otages politiques, ils étaient rassemblés dimanche, pour attendre la libération des quatre premiers, dans un hôtel de Villavicencio.

Cette petite ville à une centaine de kilomètres à l'est de Bogota s'était transformée, en moins de 24 heures, en épicentre de l'opération de récupération des otages : c'est ici que les premiers devaient arriver, à bord d'un hélicoptère mis à disposition du CICR par le Brésil, ici aussi que les communiqués des autorités étaient lus à la presse, venue en nombre.

Dimanche matin, ils débordaient de joie dans l'attente du retour de trois policiers et d'un militaire, enlevés en 2007, soit parce qu'ils étaient proches soit par espoir de voir s'ouvrir derrière eux la porte de sortie pour tous.

Le soir, l'ambiance était tout autre, lourde, après l'annonce de la décision du président Alvaro Uribe de ne plus autoriser la médiation d'une sénatrice d'opposition indispensable au processus, Piedad Cordoba, en raison de déclarations désobligeantes d'un membre de «Colombiens pour la paix» (un mouvement de personnalités de gauche fondé par la sénatrice) participant aussi à la médiation.

Si la sénatrice, désignée comme seule intermédiaire valable par la guérilla était exclue, restait-il une chance de liberté pour les deux autres otages attendus lundi et mardi, l'ex-gouverneur Alan Jara et l'ancien député Sigifredo Lopez, enlevés respectivement en 2001 et 2002 ? Et pour les otages restants ?

«Cela a été une douche froide. La douleur de la famille d'Alan Jara a été très grande», a déclaré à l'AFP lundi Gustavo Moncayo, dont le fils Pablo Emilio est détenu par les Farc depuis onze ans.

Milena Murillo, soeur aînée du policier Enrique Murillo, détenu depuis le 1er novembre 1998, comme Maria Teresa Paredes, l'épouse du colonel Luis Mendieta, également enlevé ce jour-là, ont perdu le moral.

«J'ai eu un noeud à l'estomac et j'ai senti que je portais une pierre. J'ai pensé que tout allait échouer», avoue aussi Joimer Ojeda, un ami d'Alan Jara.

Lundi matin pourtant, l'horizon s'est à nouveau éclairci avec la décision du gouvernement d'autoriser tout de même la participation au processus de la sénatrice Piedad Cordoba.

Lorsque celle-ci est venue annoncer que l'opération de récupération des otages reprendrait mardi matin, elle a été accueillie par des hourras.

«L'espérance est de retour, ceci est une chaîne, s'il manque un chaînon, ceux qui guettent leur tour pour la liberté ne peuvent plus rien attendre», a confié Milena Murillo, qui espère avoir des nouvelles de son frère par Alan Jara.

«Le retour d'Alan, c'est déjà savourer un peu la liberté de mon époux, car nous sommes comme une famille», a confié Maria Teresa Paredes: «Je sais qu'il va revenir. Je ne sais pas quand, mais je garde espoir».

Une fois Alan Jara et Sigifredo Lopez libérés, les Farc détiendront encore 22 militaires et policiers, des prisonniers dits «politiques», c'est-à-dire échangeables de leur point de vue contre des guérilleros capturés par les autorités.

Les Farc détiendront encore, par ailleurs, des centaines d'anonymes (entre 350 et 700 selon les estimations) enlevés pour exiger des rançons.