Winnie Mandela, l'ex-épouse du premier président sud-africain noir Nelson Mandela et héroïne de la lutte contre l'apartheid, est décédée lundi à l'âge de 81 ans, suscitant une pluie d'hommages pour une «mère de la nation» au parcours très controversé.

Le couple qu'elle a formé avec Nelson Mandela pendant plus de trente ans personnifiait le combat acharné contre le régime raciste.

Leur photo, main dans la main, à la sortie de prison de Nelson Mandela en 1990 après vingt-sept ans derrière les barreaux, symbolisait aussi leur victoire face à l'apartheid, qui a été officiellement abolie en 1994.

Mais la réputation de celle que le peuple sud-africain appelait affectueusement «Winnie» a été ternie par plusieurs dérapages politiques et des affaires de corruption.

«C'est avec une grande tristesse que nous informons le public que Mme Winnie Madikizela Mandela est décédée à l'hôpital Milpark de Johannesburg lundi 2 avril (...) des suites d'une longue maladie», a annoncé son porte-parole, Victor Dlamini.

Le président sud-africain Cyril Ramaphosa, patron du Congrès national africain (ANC) à la pointe de la lutte anti-apartheid, a salué la mémoire de cette «voix du défi et de la résistance».

La nation lui rendra hommage lors d'obsèques officielles le 14 avril, a-t-il annoncé après s'être rendu à son domicile dans le township de Soweto.

Le prix Nobel de la paix Desmond Tutu a rendu hommage à un «symbole majeur» du combat contre le régime ségrégationniste. Winnie «a refusé de céder face à l'incarcération de son mari, le harcèlement perpétuel de sa famille par les forces de sécurité (...). Son attitude de défi m'a profondément inspiré, ainsi que des générations de militants», a déclaré l'ex-archevêque anglican.

Les réactions ont aussi afflué depuis le continent. Pour l'Union africaine (UA), Winnie Mandela «a sacrifié sa vie pour la liberté en Afrique du Sud et les femmes du monde entier». Le président nigérian Muhammadu Buhari a, lui, salué une «femme à la détermination, la ténacité et la persévérance exceptionnelles».

Pasionaria 

«Tous les Sud-Africains sont redevables à Mama Winnie», a réagi la Fondation Nelson Mandela. Elle représentait «la lumière qui nous a montré le chemin à tant d'entre nous», a estimé le chef de l'opposition sud-africaine, Mmusi Mainane.

Dans le townhip de Soweto, où Winnie vivait toujours, des dizaines d'habitants se sont pressés devant son domicile. «C'est un grand choc», a témoigné un voisin, But Makganemele. «Tout au long de sa vie, elle a fait partie de l'avant-garde du combat contre l'oppression.»

C'est en 1958 que la flamboyante jeune femme au caractère trempé épouse Nelson Mandela. Mais, très vite, le couple est séparé par les activités politiques du mari, condamné en 1964 à la prison à perpétuité.

Pendant ses 27 années de prison, Winnie résiste aux persécutions incessantes du régime raciste et devient l'égérie de la lutte anti-apartheid. Elle ne plie pas devant les astreintes à domicile, les attaques à la bombe, les détentions.

«Les années de prison m'ont endurcie (...) Il n'y a plus rien qui ne me fasse peur», affirmait-elle dans une interview en 1987.

Les lois imposant la ségrégation entre les Noirs et les Blancs sont finalement abolies en 1991.

En 1994, c'est la consécration pour Nelson Mandela et son épouse. Lui devient le premier président noir d'Afrique du Sud, elle entre dans le gouvernement.

«Mal tourné» 

Les années de détention ont pourtant porté un coup fatal à leur union. Les frasques de Winnie, son discours violent et les accusations de meurtre portées contre ses gardes du corps l'éloignent de son époux. Le couple divorce en 1996.

Dans son discours le plus controversé, en 1986, Winnie avait appelé à «libérer ce pays avec des allumettes», une référence au supplice du «collier» enflammé autour du cou des «traîtres».

En 1998, la Commission vérité et réconciliation (TRC) l'avait déclarée «coupable politiquement et moralement des énormes violations des droits de l'Homme» commises par sa garde rapprochée.

«Quelque chose a terriblement mal tourné», avait déploré il y a quelques années à son sujet Desmond Tutu.

À sa mort en 2013, Nelson Mandela, entre-temps remarié, ne lui a rien légué. Winnie, très amère, avait saisi la justice, qui l'avait déboutée.

L'une de ses dernières apparitions publiques remonte à la conférence de l'ANC en décembre à Johannesburg, où elle avait été saluée par des applaudissements nourris.

Connue pour ne pas mâcher ses mots, elle avait récemment dénoncé les échecs du gouvernement de l'ANC.

«La réconciliation n'a été qu'une façade», avait-elle asséné. «Je vis à Soweto, un township créé par le régime d'apartheid pour parquer les Noirs. Un quart de siècle après l'abolition de l'apartheid, il n'y a toujours pas un seul Blanc à Soweto (...) Où est le changement?»

Photo Ulli Michel, archives REUTERS

Nelson Mandela, accompagné de son épouse Winnie, à sa sortie de prison de Nelson Mandela, en 1990.

C'est en 1958 que la flamboyante jeune femme au caractère trempé épouse Nelson Mandela. Mais, très vite, le couple est séparé par les activités politiques du mari, condamné en 1964 à la prison à perpétuité.

Pendant ses 27 années de prison, Winnie résiste aux persécutions incessantes du régime raciste et devient l'égérie de la lutte antiapartheid. Elle ne plie pas devant les astreintes à domicile, les attaques à la bombe, les détentions.

« Les années de prison m'ont endurcie [...] Il n'y a plus rien qui ne me fasse peur », affirmait-elle dans une interview en 1987.

Les lois imposant la ségrégation entre les Noirs et les Blancs sont finalement abolies en 1991.

En 1994, c'est la consécration pour Nelson Mandela et son épouse. Lui devient le premier président noir d'Afrique du Sud, elle entre dans le gouvernement.

« Mal tourné »

Les années de détention ont pourtant porté un coup fatal à leur union. Les frasques de Winnie, son discours violent et les accusations de meurtre portées contre ses gardes du corps l'éloignent de son époux. Le couple se déchire et leur divorce est prononcé en 1996.

Dans son discours le plus controversé, en 1986, Winnie avait appelé à « libérer ce pays avec des allumettes », une référence au supplice du « collier » enflammé autour du cou des « traîtres ».

En 1998, la Commission vérité et réconciliation (TRC) l'avait déclarée « coupable politiquement et moralement des énormes violations des droits de l'Homme » commises par sa garde rapprochée.

« Quelque chose a terriblement mal tourné », avait déploré il y a quelques années à son sujet Desmond Tutu.

À sa mort en 2013, Nelson Mandela, entre-temps remarié avec Graça Machel, ne lui a rien légué. Winnie, très amère, avait saisi la justice, qui l'avait déboutée.

L'une de ses dernières apparitions publiques remonte à la conférence de l'ANC en décembre à Johannesburg, où elle avait été saluée par des applaudissements nourris.

Connue pour ne pas mâcher ses mots, elle avait récemment dénoncé les échecs du gouvernement de l'ANC.

« La réconciliation n'a été qu'une façade », avait-elle asséné. « Je vis à Soweto, un township créé par le régime d'apartheid pour parquer les Noirs. Un quart de siècle après l'abolition de l'apartheid, il n'y a toujours pas un seul Blanc à Soweto [...] Où est le changement ? »

Photo archives Agence France-Presse

Les grandes dates dans la vie de Winnie Mandela

- 1936: naissance le 26 septembre de Nomzamo Winifred Zanyiwe Madikizela, dite Winnie, dans la province du Cap oriental (sud).

- 1955: première assistante sociale noire du pays dans un hôpital de Soweto, le ghetto noir de Johannesburg.

- 1958: épouse Nelson Mandela.

- 1962: reste seule avec ses fillettes après l'arrestation de son mari. Malgré les intimidations et des séjours en prison, elle devient l'une des figures du Congrès national africain (ANC).

- 1986: dans son discours le plus controversé, elle appelle à libérer le pays avec des allumettes, référence au supplice du «collier» (pneu enflammé autour du cou).

- 1990: libération de Nelson Mandela après 27 ans de prison.

- 1991: reconnue coupable de complicité dans l'enlèvement de quatre jeunes, dont un est décédé, par sa garde rapprochée, le «Mandela United Football Club» (MUFC).

- 1992: accusée de corruption et mauvaise gestion, elle est démise de ses fonctions dirigeantes à l'ANC.

- 1994: vice-ministre de la Culture dans le premier gouvernement post-apartheid. Renvoyée l'année suivante pour insubordination, elle reste députée et présidente de la Ligue des femmes.

- 1996: après quatre ans de séparation, elle divorce de Nelson Mandela.

- 1998: la Commission Vérité et réconciliation (TRC) la déclare «coupable politiquement et moralement des énormes violations des droits de l'Homme» commises par le MUFC.

- 2003: condamnée pour fraude.