Le Kenya rend hommage ce dimanche sous haute sécurité aux 67 victimes de l'attaque du centre commercial Westgate, perpétrée il y a un an jour pour jour dans la capitale Nairobi par un commando islamiste.

Dimanche, les commémorations doivent débuter à 11h00 locales (4h00 heure du Québec) dans une forêt de la banlieue de Nairobi, Karura. Une plaque en l'honneur de ceux qui ont perdu leur vie dans l'attaque sera dévoilée à l'endroit où leur familles avaient planté des arbres, un pour chaque personne tuée, l'an dernier.

Des prières oecuméniques seront alors dites, et, dans la soirée, auront lieu un concert et une veillée aux chandelles sur le site des Musées nationaux du Kenya, où un mémorial a été mis en place et un film de témoignages déjà projeté cette semaine.

Le 21 septembre 2013, vers midi, quatre hommes armés de grenades et kalachnikovs avaient fait irruption dans le Westgate. Comme tous les samedis, l'hypermarché du centre commercial, ses restaurants, boutiques de mode, agences de voyages... étaient bondés de représentants de la classe moyenne kényane et d'expatriés.

Hommes, femmes et enfants allaient tomber indifféremment sous les tirs des assaillants, qui très vite allaient se retrancher dans le bâtiment, et tenir tête quatre jours aux forces de l'ordre kényanes.

Dans le film de témoignages diffusé cette semaine, des rescapés se souviennent «d'une zone de guerre», d'«un champ de bataille», mais aussi de l'immense solidarité entre les personnes restées plusieurs heures prises au piège des tirs.

À l'occasion du premier anniversaire de l'attaque, la police kényane est en état d'alerte, par crainte de nouveaux attentats.

Samedi, le chef de la police, David Kimaiyo, a affirmé que les patrouilles policières «ont été doublées à travers le pays» et que des «unités spéciales se tiennent prêtes à toute éventualité». «Il est demandé à la population de travailler étroitement avec nos policiers».

Deux ressortissants iraniens, munis de faux passeports, ont par ailleurs été arrêtés cette semaine à l'aéroport de Nairobi. Les forces de l'ordre n'ont cependant pas précisé s'ils feraient l'objet d'une simple procédure pour entrée illégale sur le territoire ou en tant que suspects de terrorisme.

Questions en suspens

Un an après l'attaque du Westgate, un certain nombre de questions demeurent, notamment sur l'identité des assaillants, qui, selon enquêteurs et médecins légistes, ont tous péri dans les affrontements avec les forces de l'ordre.

On sait qu'ils étaient liés aux insurgés islamistes somaliens shebab -- ces derniers avaient revendiqué l'attaque, disant agir en représailles à l'intervention militaire kényane menée depuis deux ans contre eux dans le sud de la Somalie.

Depuis l'attaque, un procès s'est ouvert : celui de quatre autres hommes, accusés, sans avoir pris part à l'attaque le 21 septembre, d'avoir aidé le commando à la préparer. Mais débuté en janvier, il a peu avancé. Plusieurs fois ajourné, il doit reprendre mardi.

Les forces de l'ordre avaient elles été épinglées pour leur manque d'efficacité lors de l'attaque. Elles avaient aussi été accusées d'avoir pillé le bâtiment à l'issue du siège. Mais cette semaine au Kenya, le ton était davantage au rassemblement qu'à la critique.

Au-delà du très lourd bilan humain, l'attaque du Westgate, un symbole de l'émergence de la classe moyenne kényane qui n'a toujours pas rouvert, a aussi porté un coup dur à l'économie kényane, déjà durement frappée par des violences postélectorales meurtrières fin 2007 et début 2008, puis par une grave sécheresse.

D'autant que l'année qui a suivi a été marquée par de nouvelles attaques contre des bus et marchés à Nairobi et Mombasa, sur la côte touristique de l'océan Indien, où des massacres, également attribués aux shebab, ont aussi eu lieu près de l'archipel de Lamu.

En juin, la Banque mondiale a abaissé de 0,5 point, à 4,7%, sa prévision de croissance pour le Kenya en 2014.

Les familles des victimes poursuivent, elles, leur travail de deuil.

Dimanche dans la forêt de Karura, Rajesh Shah, l'un des organisateurs de la cérémonie, espère voir «les familles et les amis des victimes (venir) prendre part à ce processus de guérison». Il compte aussi sur tous ceux qui se sont risqués dans le bâtiment ce 21 septembre 2013 pour sauver des vies, au péril de la leur.