Les Nigériens ont voté samedi dans le calme pour élire un président civil après un an de pouvoir militaire, un scrutin qui doit «servir d'exemple à l'Afrique» à l'heure où une crise postélectorale met la Côte d'Ivoire au bord de la guerre civile. Le second tour de la présidentielle doit départager l'opposant historique Mahamadou Issoufou, 59 ans, et l'ex-premier ministre Seïni Oumarou, 60 ans.

Quelque 6,7 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes dans ce pays sahélien, important producteur d'uranium, mais classé parmi les plus pauvres du monde, qui doit également faire face à la menace croissante d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).

Ce second tour, destiné à installer un civil au pouvoir après le coup d'État militaire de février 2010, s'était déroulé dans le calme jusqu'à la mi-journée.

«Aucun incident ne nous a été signalé, pour le moment tout est calme», a assuré à l'AFP un membre de la Commission électorale nationale indépendante (CÉNI), estimant qu'il «est trop tôt» pour évaluer la participation.

Le chef de la junte, le général Salou Djibo, a symboliquement ouvert le vote à Niamey.

«C'est un grand jour pour moi et pour tous les Nigériens. Si nous réussissons ce scrutin si honorable, nous aurons accompli ensemble cette démocratie qui servira d'exemple à l'Afrique», a-t-il indiqué, en tenue militaire et visiblement détendu.

Après avoir voté à la mairie de Niamey, les deux candidats se sont dits persuadés de remporter le scrutin.

«Je suis très confiant, la politique n'est pas un jeu d'arithmétique, tous les compteurs sont remis à zéro après le premier tour du scrutin, donc je ne vois pas pourquoi je ne passerais pas», a déclaré Seïni Oumarou aux journalistes.

«Nous allons gagner cette élection, j'ai bénéficié de soutiens importants dont celui de l'ancien premier ministre Hama Amadou (19%), je pense que les reports de voix seront tous aussi importants», a de son côté clamé Mahamadou Issoufou.

À la demande du chef de la junte et afin d'éviter des «troubles postélectoraux», les deux candidats ont promis qu'ils «accepteront» les résultats.

Le pays va tourner la page du putsch qui avait renversé en février 2010 le président Mamadou Tandja, après dix ans de pouvoir et une grave crise née de sa volonté de se maintenir au-delà de son second et dernier quinquennat légal.

Les deux finalistes ont des profils radicalement différents: M. Issoufou a été l'éternel adversaire du chef de l'État déchu et détenu depuis un an, alors que M. Oumarou est l'«héritier» autoproclamé de M. Tandja, dont il fut premier ministre.

Arrivé en tête (36%) au premier tour, M. Issoufou part favori grâce au soutien de M. Amadou (19%). M. Oumarou (23%) bénéficie pour sa part du ralliement de l'ex-chef de l'État Mahamane Ousmane (8%).

Mais l'heureux vainqueur devra «beaucoup travailler. Le pays a souffert, il doit rendre le Niger crédible à l'extérieur et nous sortir de la misère et des crises alimentaires», indique Tankari Tiémogo, commerçant, 51 ans.

Pour Moussa Mahama, un artisan de 25 ans, le président élu «devra trouver des débouchés pour écouler les produits artisanaux, mais il doit d'abord «cogner trop fort» sur les terroristes (d'Al-Qaïda) qui ont fait fuir les touristes étrangers».

Cette ancienne colonie française, indépendante depuis 1960, est devenue, avec le Mali et la Mauritanie, l'un des terrains de prédilection d'AQMI, qui y a multiplié les rapts d'Occidentaux.

En janvier, deux jeunes Français avaient été enlevés en plein centre de Niamey. Les otages avaient été tués lors d'un sauvetage manqué mené par des forces françaises en territoire malien.

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