Le Sénégal a symboliquement «repris» dimanche, cinquante ans jour pour jour après son indépendance, sa souveraineté sur les bases militaires françaises installées à Dakar, qui accueillent quelque 1200 hommes, mais les négociations se poursuivent avec l'ex-puissance coloniale.

Les troupes sénégalaises, accompagnées d'un contingent français, devaient défiler dimanche dans la capitale sur le boulevard du général de Gaulle à l'occasion de la fête de l'indépendance et en présence du ministre français de l'Intérieur Brice Hortefeux.

Cette décision «historique» mais sans grand effet concret à court terme, annoncée samedi soir dans un discours à la nation par le président Abdoulaye Wade, est très symbolique pour un pays marqué par 350 ans de présence française et qui fut la toute première colonie française au sud du Sahara.

Dakar constitue une des trois installations permanentes de l'armée française en Afrique, avec Libreville et Djibouti.

Le discours a d'ailleurs été diffusé quelques heures après l'inauguration du monument controversé de la Renaissance africaine, censé symboliser l'émergence d'un continent d'un milliard d'habitants après cinq siècles de traite, d'esclavage et de colonisation.

Pour le président Wade, le fait de conserver des bases militaires, terrestre, aérienne et navale au Sénégal, un des rares pays du continent à n'avoir jamais connu de coups d'État, «a paru de plus en plus incongrue et a été souvent ressentie (...) comme une indépendance inachevée».

«Je déclare solennellement que le Sénégal reprend à partir de ce jour 4 avril à 00h00, heure locale (19h00, heure de Montréal) toutes les bases (militaires) antérieurement détenues sur notre sol par la France et entend y exercer sa souveraineté qui repose sur la présente déclaration», a-t-il poursuivi.

Mais selon plusieurs sources françaises, la question de la souveraineté ne se pose pas, car les terrains sont restés sénégalais, n'ont jamais été propriétés de la France mais seulement mis à sa disposition.

Plusieurs questions restent toutefois en suspens.

Que va-t-il se passer après l'annonce sénégalaise? «Les discussions se poursuivent», a très vite réagi auprès de l'AFP à Paris le porte-parole du ministère français de la Défense Laurent Teisseire.

En février, les deux capitales s'étaient entendues pour fermer ces installations. Paris veut à la place créer un «pôle de coopération militaire à vocation régionale» mais avec seulement 300 militaires.

Cela va-t-il précipiter le départ des troupes françaises? «Le président aurait pu annoncer une date de départ, il ne l'a pas fait», a relevé à l'AFP une source française.

Aucun calendrier de retrait n'a officiellement été communiqué. Mais progressivement, les troupes quittant Dakar dans le cadre des habituelles rotations ne seront plus remplacées à effectif constant.

Combien de soldats vont rester à Dakar? Le président Nicolas Sarkozy, absent des cérémonies du cinquantenaire, avait indiqué fin février que seuls 300 hommes resteraient dans la capitale sénégalaise, soit un quart de l'effectif actuel.

Une chose est d'ores et déjà acquise: le 23e Bataillon d'Infanterie de Marine (Bima), installé non loin du port de Dakar, partira.

Où sera situé ce nouveau «pôle régional»? Le Sénégal avait proposé aux Français de mettre en place des installations militaires près de Thiès, à 70 km à l'est de Dakar, à proximité du nouvel aéroport international en construction. Les Français ont refusé, notamment en raison du coût financier.