Manque de transparence et de surveillance, information «éparse et incomplète», subventions accordées sans appel de propositions, les problèmes de gouvernance au Fonds vert n'augurent rien de bon, alors que des centaines de millions supplémentaires y seront versés au cours des prochaines années.

Hier, pour la deuxième fois en deux ans, le commissaire au développement durable (CDD) a mis au jour de nombreuses lacunes dans la gestion de ce fonds administré par le ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques.

Plus de 2,1 milliards ont transité par ce fonds depuis sa création en 2006. Près de 500 millions s'y trouvaient encore en mars 2013, selon le rapport du commissaire.

«Ce qui me fascine, c'est qu'en 2012, il y avait un rapport pratiquement similaire avec une réponse presque identique du Ministère», affirme Pierre-Olivier Pineau, professeur à l'école des Hautes Études commerciales.

La plus grande partie des sommes versées au Fonds vert proviennent de la défunte taxe carbone, qui a été remplacée cette année par le système de plafonnement et de vente de droits d'émission de gaz à effet de serre.

«La vente de droits d'émission va rapporter 500 millions par année à partir de 2015, contre 200 millions environ pour la taxe carbone», note M. Pineau, pour souligner l'urgence d'améliorer la gestion du fonds.

Manque de transparence

Le CDD note que plusieurs millions ont été distribués sans appels d'offres ou sans objectifs précis et mesurables

Mais même dans le cas contraire, les décisions manquent de transparence, affirme André Bélisle, de l'Association québécoise de lutte à la pollution atmosphérique (AQLPA)

«Deux de nos projets ont été vérifiés par le commissaire, explique M. Bélisle. Notre projet Faites de l'air sur le recyclage de vieux véhicules et notre programme Changez d'air pour le remplacement des vieux poêles à bois.

«Dans notre cas, il y avait des objectifs et des résultats précis et mesurables, mais le projet sur les poêles à bois ne sera pas reconduit même si on a atteint ou dépassé tous les objectifs.

«Alors, sur le manque de transparence, on partage le constat du commissaire», dit M. Bélisle.

Mécontement des entreprises

Les entreprises ont aussi des raisons de se plaindre de la gestion du Fonds vert, affirme Hélène Lauzon, du Conseil patronal de l'environnement du Québec.

Elle souligne à son tour que la vente de crédits carbone va faire exploser les sommes transitant par le Fonds vert. «Il n'y a pas suffisamment de programmes accessibles aux entreprises pour améliorer leur efficacité énergétique», dit-elle.

Ces programmes seront importants afin de permettre aux petites et moyennes entreprises d'absorber la hausse des coûts en carburants qui pourra leur être refilée à partir du 1er janvier 2015. «Il faut qu'elles aient accès au Fonds vert pour réduire leur consommation», affirme Mme Lauzon.