Le grand réalisateur taïwanais Hou Hsiao-hisen a déjà accumulé d'innombrables récompenses dans le monde entier depuis le début de sa carrière, mais avec son dernier film, The Assassin, il vise un Oscar.

M. Hou, en tournée promotionnelle avant le lancement aux États-Unis de ce long métrage, a parlé lors d'une interview à l'AFP de ce que représenterait pour lui un Oscar du meilleur film étranger, convoité cette année par 81 pays.

Il reconnaît que The Assassin, qui se déroule au IXe siècle en Chine, risque de ne pas être du goût de la majorité des Américains, habitués aux productions hollywoodiennes ultra-rythmées et spectaculaires.

«Je pense qu'ils vont s'endormir», a-t-il admis en riant. «La plupart des gens vont avoir du mal à comprendre de quoi parle le film».

The Assassin, qui a obtenu le Prix de la mise en scène au Festival de Cannes, devrait séduire un public restreint mais fidèle à son cinéma.

Il parle d'une tueuse à gages jouée par la star taïwanaise Shu Qi, renvoyée dans sa province pour en tuer le gouverneur... qui se trouve aussi être l'homme qu'elle aime.

M. Hou espère d'un éventuel Oscar davantage de visibilité, particulièrement en Europe, où son film n'a pas encore de distributeur.

Il s'inquiète toutefois: «quand on gagne un Oscar, cela génère une attente et j'ai peur que le public soit déçu en voyant le film» car c'est le genre d'oeuvre qui «nécessite une certaine concentration, une certaine disposition d'esprit pour être pleinement appréciée».

Influence hollywoodienne

S'il reconnaît faire des films «d'art et d'essai, pour le meilleur ou pour le pire», le réalisateur de 68 ans, l'un des plus grands noms de la «Nouvelle vague» taïwanaise et du cinéma asiatique, revendique paradoxalement une influence américaine.

Celui dont la filmographie court sur plus de trois décennies, avec notamment Un temps pour vivre, un temps pour mourir ou Goodbye South, Goodbye, a grandi en regardant les films de Hollywood.

«Je me souviens avoir vu Le parrain après avoir lu le livre. Hollywood a été une grande influence», mais «c'est difficile de faire le genre de films produits à Hollywood avec le type de ressources et d'environnement auxquels j'ai accès», remarque-t-il.

Parce que les acteurs professionnels manquent à Taïwan, il a souvent travaillé avec des acteurs non professionnels.

«Je leur permets d'être ce qu'ils sont. J'explore leurs qualités et je travaille avec», raconte-t-il.

Parmi ses cinéastes américains favoris, il cite Elia Kazan, Martin Scorsese, Quentin Tarantino et les frères Coen. Il avoue aussi un faible pour les aventures de Jason Bourne, héros du film éponyme.

Son prochain projet reste pourtant bien ancré dans son univers si personnel: il s'inspire du système d'irrigation sophistiqué mis en place quand Taïwan était occupé par le Japon. Il a été recouvert par les Japonais quand l'occupation a pris fin et l'eau coule toujours en sous-sol.

«J'ai étudié le sujet, et il pourrait bien inclure quelques créatures mythologiques», conclut-il malicieusement.