Qu’est-ce que le travail, exactement ? Quel sens lui donne-t-on et quelle place lui laisse-t-on ? Et où allons-nous avec tout ça ? Une série documentaire s’attaque à ce vaste et très actuel sujet, en pleine mutation depuis la pandémie.

La société du travail, une série de six épisodes de 30 minutes diffusée sur Savoir média à partir de mercredi (également en ligne), n’est pas un titre anodin. « Parce que le travail, c’est la société, c’est l’organisation de la société. [...] Et dans le monde du travail, on retrouve les grands enjeux de la société », explique Geneviève Philippon, coréalisatrice de la série, rencontrée la semaine dernière pour en discuter. « Et le travail touche tout le monde, c’est au cœur de notre société, et en essayant de trouver des façons pour que ça fonctionne, tout le monde en tire profit. Et tout le monde est gagnant », renchérit Isabelle Darveau, sa complice et coréalisatrice.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Geneviève Philippon et Isabelle Darveau, coréalisatrices, en entrevue au café Les oubliettes

Un sujet drôlement qui nous interpelle, avouez. « On passe la majorité de nos vies à travailler. Il y a un côté très gestion. Mais finalement, on parle de vies, de comment les gens occupent leur temps, ce qui les motive ! », rajoutent-elles.

Signe des temps, et par un hasard révélateur, on a compté pas moins d’une bonne vingtaine de télétravailleurs dans le coquet café de Rosemont (Les oubliettes, pour ne pas le nommer) où nous étions installées pour discuter.

Un incontournable

Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que la série documentaire, assez classique dans sa forme, quoiqu’audacieuse dans ses angles, commence aussi sur cet incontournable sujet (le télétravail), si marginal il y a quelques années, aujourd’hui quasi omniprésent, en rappelant ses nombreux avantages (allo, la flexibilité), mais aussi ses limites (la perte de frontières entre temps de travail et temps de repos, notamment).

Entre autres questions abordées au fil des épisodes, mentionnons : des sujets les plus attendus (la pénurie de main-d’œuvre) aux plus philosophiques (la quête du sens), en passant par les plus engagés (l’urgence de repenser le modèle économique, carrément).

La série braque ici sa caméra sur toutes ces nombreuses transformations en cours (travail hybride, immigration, robotisation, écoconception), en allant chaque fois à la rencontre d’un exemple inspirant de réussite. On est ici en mode solution, et ça paraît.

Et c’est surtout voulu. Lorgnette positive incluse. Une lunette qui manque par moments de nuances, cela dit. « On n’allait pas chercher les problèmes, on allait chercher les transformations », justifient nos interlocutrices.

On y découvre donc une jeune famille épanouie en télétravail, un verger qui accueille à bras ouverts les travailleurs étrangers, une entreprise qui a migré vers l’autogestion. On a même droit à une entrevue avec Fady Dagher, le directeur du Service de police de la Ville de Montréal, à qui l’on doit une petite révolution lors de son passage à Longueuil, en matière de changement de culture policière (de l’« intervention » à l’« aide à la population »). L’épisode sur la culture d’entreprise (le troisième) est d’ailleurs tout particulièrement intéressant. Et prometteur.

Un sens au travail

Certes, vous l’aurez compris, cette série ratisse large, très large. Même si, de leur propre aveu, elles ont dû écarter certains sujets (le travail des enfants, les employés atypiques, les travailleurs qui « punchent », etc.) C’est sans compter que chaque enjeu est en prime analysé par un expert, observateur ou professeur (notamment de HEC Montréal, qui a coproduit la série), lesquels s’adressent directement à la caméra, dans de longs entretiens un brin statiques, quoique toujours archifouillés. Et les deux réalisatrices s’en félicitent : « Ce sont des entrevues longues, pas des clips punchés, on aime plonger dans les univers différents. [...] C’est une démarche de documentaire d’observation », expliquent-elles.

Le plus gros enjeu, selon leurs observations ? « Le sens du travail, croient-elles. Parce qu’on a besoin du travail de tout le monde, mais comment valoriser les emplois nécessaires, quoique moins attrayants ? » Morale ? « On peut toujours trouver un sens au travail, quel qu’il soit. On peut aussi transformer le travail. Et le télétravail en est le meilleur exemple, la meilleure manifestation de cette idée. On n’est pas esclave... » Objectif : ne pas le devenir.

La société du travail sera diffusé dès le mercredi 1er mars à 21 h sur Savoir média. Également en ligne.

Regardez le documentaire La société du travail