Les employeurs actuels du reporter François Bugingo ont annoncé samedi la suspension de leurs collaborations avec le journaliste, après la publication d'une enquête de La Presse révélant qu'il a inventé de toutes pièces plusieurs reportages internationaux.

La direction du 98,5 FM, de même que le Groupe Média, qui inclut TVA Nouvelles, le Journal de Montréal et le Journal de Québec, ont choisi de suspendre le collaborateur, le temps de faire des vérifications à propos des faits qui lui sont reprochés.

La chaîne MAtv, qui devait présenter une émission sur le multiculturalisme dans laquelle François Bugingo agissait comme mentor, a quant à elle choisi de remplacer l'épisode par un autre, à propos de l'environnement, celui-là. «Cette décision a été prise par la direction pour des raisons exceptionnelles», a annoncé la station de télévision.

François Bugingo, ancien président de Reporters sans frontières Canada et ancien animateur et rédacteur en chef de la course Évasion autour du monde, entre autres, collaborait au bulletin télévisé Le TVA 22 h, en plus de tenir une chronique quotidienne sur les affaires internationales à la radio du 98,5 FM et d'alimenter un blogue et une chronique au Journal de Montréal.

Dans un communiqué, la direction de Groupe Média a dit des allégations envers son collaborateur qu'elles étaient «importantes et prises au sérieux». «La collaboration avec M. Bugingo est donc suspendue jusqu'à ce que des vérifications soient faites. La direction tient à préciser que M. Bugingo n'est pas un employé du Groupe Média, mais bien un collaborateur», a écrit Groupe Média, qui englobe le secteur dédié aux médias de divertissement et d'information au sein de Québecor Média et de Groupe TVA.

La direction du 98,5 FM a envoyé un document semblable, dans lequel elle a annoncé suspendre «jusqu'à nouvel ordre les collaborations avec le chroniqueur, le temps de faire la lumière sur ces évènements». L'animateur Benoit Dutrizac, dont l'émission Dutrizac, l'après-midi comprend une chronique quotidienne de François Bugingo, n'a pas souhaité commenter la nouvelle. «Ma réaction et mes commentaires lundi à l'émission», a-t-il seulement écrit, sur Twitter.

Le journaliste se défend

François Bugingo s'est quant à lui défendu sur sa page Facebook. «Comme vous, j'ai vu et lu cet article dégradant qui m'est consacré dans un quotidien montréalais. Je suis sidéré par cette attaque, et je suis désolé que mes employeurs actuels y soient mêlés malgré eux», a-t-il écrit.

«Depuis deux ans que vous me suivez quotidiennement à la radio, à la télé, dans le journal et sur les plateformes numériques, vous savez bien que l'information que je vous partage est toujours vérifiée, solide et respectueuse de votre attention», a-t-il ajouté. Sous son commentaire, des centaines de personnes ont écrit des mots d'encouragement, tandis que des centaines d'autres ont plutôt formulé des remontrances et évoqué une défense faible, à leur avis. Bas du formulaire

La FPJQ «très préoccupée»

La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) a elle aussi réagi au reportage, se disant « très préoccupée » par les informations révélées par La Presse.

«Les faits rapportés à propos de M. Bugingo, un membre de la FPJQ, sont très sérieux, car ils ont le potentiel d'entacher la crédibilité de la profession journalistique», a écrit la Fédération dans un communiqué.

«L'article fait état de reportages fabriqués et de faits inventés, de façon récurrente, sur plusieurs années», a aussi indiqué la FPJQ. « Compte tenu de la gravité et du caractère systémique des fautes reprochées, l'exécutif de la FPJQ a décidé de mettre en oeuvre une procédure prévue dans ses règlements et d'inviter Monsieur Bugingo à s'expliquer.»

En entrevue à La Presse, la directrice générale de la FPJQ, Caroline Locher, a expliqué que l'exécutif de la Fédération enverra une convocation officielle à François Bugingo en début de semaine. S'en suivra une audition, au cours de laquelle le journaliste sera invité à donner sa version des faits et à répondre aux allégations qui le visent.

Sur sa page Facebook, François Bugingo a écrit avoir l'intention de défendre son intégrité «en temps et lieu, ainsi qu'aux instances concernées». La FPJQ ne lui avait pas encore parlé au moment de nous accorder une entrevue, samedi.

La décision concernant la sanction à imposer au reporter (qui peut aller de la suspension temporaire à l'expulsion), sera prise par le conseil d'administration de la FPJQ. Celui-ci est formé de 13 journalistes provenant de divers médias et de différentes régions du Québec.

«C'est déjà arrivé que la FPJQ révoque le statut d'un membre pour des questions de conflit d'intérêts», a affirmé Caroline Locher. «Mais je n'ai pas de souvenir qu'un cas comme celui-ci est déjà arrivé», a-t-elle ajouté.

Caroline Locher a qualifié le cas de François Bugingo d'«extrêmement rare» et d'«extrêmement grave».

«Le fait qu'il y ait une récurrence, que ce ne soit pas juste une erreur qui a ensuite été corrigée, ça ajoute à la gravité », a-t-elle souligné.

«L'information exacte est une des garanties les plus importantes de la démocratie », a-t-elle déclaré également. « On se bat pour l'accès à de l'information véridique et vraie, alors on ne peut qu'exiger la même chose de nos membres.» L'exigence, aussi, s'applique à l'ensemble des membres, qu'ils soient journalistes ou chroniqueurs, a-t-elle rappelé.

«La chronique et le journalisme d'opinion doivent aussi être basés sur des faits, et on doit les vérifier», a-t-elle tranché.

98,5 et Groupe Média suspendent le chroniqueur 

La direction de la station de radio 98,5, de même que Groupe Média, ont annoncé la suspension du chroniqueur samedi. «À la suite de l'article portant sur François Bugingo paru dans le quotidien La Presse d'aujourd'hui, la direction du 98,5 FM annonce qu'elle suspend jusqu'à nouvel ordre les collaborations avec le chroniqueur, le temps de faire la lumière sur ces évènements», a indiqué Cogeco Diffusion dans un communiqué transmis aux journalistes. 

Groupe Média, qui englobe le secteur dédié aux médias de divertissement et d'information au sein de Québecor Média et de Groupe TVA, a lui aussi choisi de suspendre son collaborateur. «La direction de Groupe Média affirme que les allégations envers un de ses collaborateurs, François Bugingo, sont importantes et prises au sérieux. La collaboration avec M. Bugingo est donc suspendue jusqu'à ce que des vérifications soient faites», lit-on dans un communiqué.  «La direction tient à préciser que M. Bugingo n'est pas un employé du Groupe Média, mais bien un collaborateur.»  Ni le 98,5 ni Groupe Média n'ont formulé d'autres commentaires.

La FPJQ réagit

La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) a elle aussi réagi au reportage, se disant «très préoccupée» par les informations révélées par La Presse.

«Les faits rapportés à propos de M. Bugingo, un membre de la FPJQ, sont très sérieux, car ils ont le potentiel d'entacher la crédibilité de la profession journalistique», a écrit la Fédération dans un communiqué.

«L'article fait état de reportages fabriqués et de faits inventés, de façon récurrente, sur plusieurs années», poursuit la FPJQ. «Compte tenu de la gravité et du caractère systémique des fautes reprochées, l'exécutif de la FPJQ a décidé de mettre en oeuvre une procédure prévue dans ses règlements et d'inviter Monsieur Bugingo à s'expliquer.»

La Fédération a également rappelé que lors de «cas graves», elle peut imposer une sanction à ses membres. Cette sanction, qui va de la suspension temporaire à l'expulsion, ne doit cependant pas être imposée avant que le membre en question ait eu la chance de s'expliquer à propos des faits qui lui sont reprochés.

Sur sa page Facebook, le journaliste a écrit avoir l'intention de défendre son intégrité «en temps et lieux, ainsi qu'aux instances concernées».

Le conseil d'administration de la FPJQ doit se pencher sur le cas de François Bugingo «dans les prochains jours».

Présent sur plusieurs tribunes 

François Bugingo tient une chronique quotidienne sur les affaires internationales à la radio 98,5 FM, en plus d'alimenter un blogue et une chronique au Journal de Montréal et de collaborer au bulletin télévisé du TVA 22 h.

Dans le passé, il a travaillé pour divers autres médias, notamment Télé-Québec et Radio-Canada.

L'enquête de La Presse indique qu'il aurait inventé certains faits dans ses commentaires et ses reportages, sur plusieurs années.