La Première chaîne de Radio-Canada a embauché un conférencier aux positions anti-gais et anti-musulmans pour donner des ateliers de formation à ses employés ces derniers jours.

Lorsque l'information à son sujet - qu'on peut trouver facilement sur l'internet - est venue aux oreilles de la direction mardi, les conférences ont été annulées in extremis.

Denis Florent est un spécialiste de la radio. Conférencier très actif en Europe, il blogue et est très présent sur les réseaux sociaux. Des membres de la direction de la Première chaîne de ICI Radio-Canada avaient assisté à ses ateliers lors des conférences Radio Dayz de 2013 et 2014. Ils ont décidé de l'inviter à s'adresser aux employés de Radio-Canada et ce, sans vérifier ses antécédents.

Or en France, Denis Florent est très actif sous le nom de Denis Cheyrouze. En plus d'afficher des opinions associées à l'extrême droite, il serait également proche de l'Opus Dei selon le site d'information Rue89 qui lui consacrait un long texte en 2013. Dans ce texte, on apprend que «dans la vie civile, Cheyrouze est connu sous le nom de Denis Florent, consultant média».

Intitulé Opus Dei: l'intriguant ami de Robert Ménard (NDLR M. Ménard est l'ex-président de Reporters sans frontières, aujourd'hui maire de Béziers, soutenu entre autres par le Front National), le reportage affirme également que Denis Cheyrouze est l'un des quatre fondateurs du site web Boulevard Voltaire. Il y a publié plusieurs textes parmi lesquels on trouve des charges à fond de train contre les Femen et les musulmans (les textes en question ne sont plus disponibles sur le web). Rue89 ajoute que ce même M. Cheyrouze a déjà appelé à «marcher sur l'Élysée» durant les débats sur le mariage gai.

Ni le compte Twitter ni le blogue de Denis Florent ne mentionnent qu'il publie aussi des textes sous la plume de Denis Cheyrouze. Mais une recherche rapide avec son nom sur Google mène toutefois vers plusieurs articles à son sujet ainsi qu'au site royaliste «Conseil dans l'espérance du roi».

Or, malgré la facilité avec laquelle on peut trouver des informations à son sujet, la direction de Radio-Canada assure qu'elle n'était pas au courant des positions de M. Florent, alias Cheyrouze, lorsqu'elle l'a embauché.

Jointe par La Presse mercredi matin, la direction a répondu quelques heures plus tard par dans un communiqué qu'elle a fait parvenir aux employés de la Première chaîne de Radio-Canada.

Dans ce courriel, le premier directeur, Radio nationale et Grand Montréal d'ICI Radio-Canada Première, Robert Nadeau, écrit: «Comme vous le savez, ce matin nous avons annulé les conférences de M. Denis Florent prévues aujourd'hui et demain. (...) Ce n'est qu'à l'issue de la journée d'hier, que la direction a appris que celui-ci défendait publiquement des positions controversées sous le nom de Denis Cheyrouze.

«En vertu du principe que Radio-Canada ne peut en aucun cas donner l'apparence d'un parti pris idéologique, et considérant qu'une session de formation est un moment privilégié qui doit se partager en toute confiance, il a été immédiatement décidé de mettre un terme au programme.»

«Au terme du premier atelier, mardi, deux employés de la radio ont avisé la direction des écrits de M. Florent», explique le directeur des relations publiques d'ICI Radio-Canada, Marc Pichette, joint par téléphone. On a contacté M. Florent en soirée pour l'aviser que ses ateliers étaient annulés. Il comprenait la situation.»

Il a été impossible de connaître le montant qui a été versé à M. Florent mais «les modalités de ce contrat ont été honorées», a précisé Marc Pichette. Personne n'avait vérifié qui était M. Florent avant de lui confier ce contrat? «Non», a répété M. Pichette qui affirme que «toute cette affaire est une erreur de bonne foi».