Les organisateurs de Montréal en lumière ne s'en cachent pas: le thème du festival 2011 étant «Femmes à l'honneur», il était de mise que Mario Pelchat, chanteur de charme et de femmes, soit de la programmation, et deux fois plutôt qu'une. La première avait lieu mardi, au Théâtre Maisonneuve, et la seconde, jeudi soir. Et croyez-moi: même si Mario Pelchat ne vous intéressait pas, vous passeriez une excellente soirée en sa compagnie. Imaginez alors si Pelchat vous intéresse, comme c'était le cas pour les 1450 femmes présentes mardi...

Ce gars-là est un pro, un vrai, et il propose un spectacle tellement bien conçu (si on excepte peut-être le fond de scène à grandes franges), tellement de bon goût et sans temps mort, tellement imprégné d'humour et d'autodérision que c'en est assez irrésistible.

Présenté en tournée depuis janvier, son nouveau spectacle Toujours de nous est un récapitulatif chronologique en chansons et en anecdotes, en photos et en vestons (ah, les vestons de Pelchat...) de ses 30 ans de carrière. Mais sans s'appesantir: si le morceau est couci-couça (comme Un monde ensoleillé), il le fait en version écourtée. Si la chanson est plus marquante ou forte, il la fait au complet, souvent dans des arrangements plus actuels. Soulignons d'ailleurs que les sept jeunes musiciens qui l'accompagnent ont franchement l'air de s'amuser, ils font les voix et dansent avec leur instrument au besoin (y compris la violoncelliste)...

C'est en quelque sorte un cours «Mario Pelchat 101» où, en près de deux heures, on le suit de 1981 à 2011. On repasse ainsi de sa première chanson, Je suis un chanteur, à son premier vrai succès J'ai le blues de toi, aux premières chansons qu'il a écrites lui-même (Ailleurs, Je ne t'aime plus, Aimer), à certaines des reprises qu'il a popularisées (C'est la vie, Les femmes), jusqu'aux chansons tirées du nouvel album, qui se défendent très bien.

Foule de femmes

La foule de femmes présentes - venues en famille, entre amies ou avec leur bien-aimé (qui s'amusait lui aussi, en plus!) -, était heureuse et, vraiment, il y a eu des moments inoubliables, mardi: c'était tellement beau, les voir toutes danser sur leur siège, le sourire aux lèvres, les fossettes aux joues, pour chanter Reste là avec «leur» Mario. Notre Mario en fait, dont on connaît plus les chansons qu'on ne le croit, tant il fait partie du tissu de notre quotidien. C'est notre pointe sentimentale, celle qu'on n'assume pas toujours...

Ce qui m'amène à ce constat un brin bizarre: alors que je suis à peu près incapable de chanter les strophes de bien des succès de Pelchat, je peux chanter absolument tous les refrains! Et force est de reconnaître qu'il y a une manière, un son Pelchat, une façon de construire les chansons qui lui est propre, immédiatement reconnaissable. Ce spectacle souligne d'ailleurs que c'est aussi un parolier inspiré par des thèmes bien éloignés de «l'amour toujours»: Le semeur (sur nos racines), Des milliards de personnes (sur les humains) et La plus belle histoire (sur la foi) tiennent vraiment bien la route.

Très en voix mardi, il a donné des interprétations assez bouleversantes de Pleurs dans la pluie et surtout de Je ne t'aime plus, toutes deux de sa plume. Oui, ce sont des classiques, et dramatiques en diable, mais manifestement, elles signifient plus que des succès radio pour lui.

Ce sont d'ailleurs les anecdotes, le ton des interventions parlées de Pelchat, les gags, son aisance et toute la mise en scène imaginée par Dominic Trudeau qui font que le spectacle file comme un charme. En outre, pour la première partie, Mario Pelchat a invité la jeune chanteuse Brigitte Boisjoli: elle réussit le petit exploit de plaire avec des versions seulement voix et guitare de quelques-unes de ses chansons. À la fois femme-enfant et rigolote petite tomboy, mignonne comme tout et mutine (elle gagnerait toutefois à lancer moins de «yeah» à tout propos), parfois franchement comique, Brigitte Boisjoli a l'étoffe des vrais chanteurs. Pendant le spectacle de Pelchat, elle est venue chanter avec lui le duo qu'il avait fait avec Céline Dion, Plus haut que moi, et on ne s'ennuyait pas de Céline!

Tout ça pour dire qu'on passe une très bonne soirée avec «Super Mario Pro», qui, l'air de rien, compte 30 ans de carrière, des succès en masse, des comédies musicales majeures (Picasso, Notre-Dame de Paris, Don Juan), des duos avec Michel Legrand et compagnie, une première partie de Madonna (en 1994, au Stade olympique), un succès au Liban... et qui a gagné le premier prix de sa vie sur la scène du Théâtre Maisonneuve, en 1981. Où il chantera de nouveau ce soir.

Mario Pelchat, Toujours de nous, jeudi soir au Théâtre Maisonneuve et en tournée à Saint-Jérôme, Trois-Rivières, L'Assomption, Québec, Gatineau, etc. Infos: mariopelchat.com