Gilbert Rozon n'est plus président du festival Juste pour rire, mais il n'est jamais très loin du siège qu'il a occupé pendant 25 ans.

On a davantage de chances désormais de le retrouver dans un avion vers Paris ou Édimbourg que dans les quartiers généraux montréalais de Juste pour rire. Depuis mars, Rozon porte le titre de président du Conseil et chef de la direction de Juste pour rire. «J'aurais aimé laisser la présidence du festival avant, confiait-il récemment à La Presse, d'une chambre d'hôtel en Allemagne. Mais il fallait trouver la bonne personne et je voulais livrer mon 25e (l'an dernier).»

Alain Cousineau, cofondateur du festival, assure la présidence depuis le printemps. «Avant de partir, il fallait trouver le bon président, explique Rozon. Alain est heureux. Il offre la constance. Moi, j'étais toujours parti.»

Gilbert Rozon a aujourd'hui tout le temps qu'il faut pour courtiser des dirigeants et administrateurs des villes du monde entier. De piloter des projets d'expansion à Londres, Nantes, Toronto et où encore. Et si Montréal devenait moins une priorité? «Pour l'instant, Montréal reste le vaisseau amiral. On a la capacité de créer ici des spectacles qui vont circuler. Le show de Florence Foresti (NDLR: l'humoriste française animera deux galas pendant le festival Juste pour rire), par exemple, a été créé à Nantes. On est content que le Cirque du Soleil parte de chez nous et fasse le tour du monde. On veut la même chose. Je reste un amoureux de ma ville.»

La Comédie-Française

Il y a quelques mois, Gilbert Rozon a marqué un dernier grand coup avant de quitter la présidence du festival: faire venir la Comédie-Française à Montréal, le temps de 15 représentations du Malade imaginaire de Molière, pendant le festival Juste pour rire (du 11 au 20 juillet). Un rêve qu'il caresse depuis 15 ans. «Je me suis attaqué à ça il y a longtemps, confirme Rozon. Mais à nos premières années, Juste pour rire avait une image d'humour très forte. Avec le temps, on a élargi le vocabulaire. Les journaux ont façonné notre image également. Ces 10-15 dernières années, j'ai mis plus d'efforts. J'ai rencontré les directeurs précédents de la Comédie-Française. J'ai accepté de me faire «rabrouer», même si j'ai toujours été bien reçu. Mais dès que Muriel Mayette a été nommée présidente, je me suis documenté sur elle. Elle est très ouverte d'esprit.»

Le buste de Molière qui trône dans le bureau de Juste pour rire à Montréal de Rozon fait état de tout l'amour qu'il porte à l'institution vieille de 328 ans. «J'aime les institutions. C'est vrai! lance Rozon. J'aime les choses qui durent. La Comédie-Française a été fondée sous Louis XIV. Il y a toute une mystique autour de ça. Au premier voyage que j'ai fait à Paris en 1974, je suis tout de suite allé à la Comédie-Française. Depuis les années 90, c'est explosif. Les représentations sont toujours à guichet fermé. L'élite autant que le grand public y assistent. La Comédie-Française est un lieu de création important.»

Gilbert Rozon n'a pas hésité à vider les coffres de Juste pour rire pour accueillir la prestigieuse troupe. «C'est une grosse opération, dit-il. On sait qu'on va perdre de l'argent. Ça coûte plusieurs centaines de milliers de dollars, voire près du million, mais c'est un coup d'éclat. C'est un privilège du président!»

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