Les marchés européens ont accueilli sans grand éclat la victoire du centriste Emmanuel Macron à la présidentielle française, l'avènement de ce pro-européen à la tête de l'État français, largement anticipée depuis le premier tour, leur ayant surtout donné l'occasion d'une consolidation.

Avec 66,10% des voix, le plus jeune président de l'histoire de France, ancien ministre de l'Économie de François Hollande et ancien banquier, a largement devancé la candidate FN Marine Le Pen (33,90%), selon les résultats définitifs du ministère de l'Intérieur lundi.

«Contrairement au dimanche 23 avril, il n'y avait pas beaucoup de suspense pour ce second tour de l'élection présidentielle et le marché avait déjà largement anticipé la victoire d'Emmanuel Macron», a commenté dans une note Jean-Jacques Friedman, directeur des investissements chez Vega IM.

Aussi, en vertu de l'adage qui veut que le marché «achète la rumeur» mais «vende la nouvelle», les indices européens voyaient leur spectaculaire progression des dernières séances s'essouffler sur fond de prises de bénéfices alors que le véritable enjeu aura été le premier tour de l'élection.

«Les actions françaises ont chuté lundi, l'indice CAC 40 ayant baissé plus nettement que les autres Bourses européennes. La raison n'est pas une déception à la suite de l'élection d'Emmanuel Macron, qui est largement vu comme favorable aux entreprises, mais simplement le fait que le marché a vu ce résultat arriver de loin», a observé Jasper Lawler, analyste chez London Capital Market.

La Bourse de Paris a ainsi clôturé en baisse de 0,91% après avoir atteint à l'ouverture un nouveau plus haut depuis le 10 janvier 2008, celle de Madrid a cédé 0,35%. Suivant la même tendance, Francfort a reculé de 0,18% tandis que Londres a fini stable à +0,05%.

Sur le marché obligataire, le taux d'emprunt français à 10 ans a terminé également à l'équilibre à 0,845% tandis que l'écart de taux avec le Bund allemand à même échéance, qui sert de référence, continuait à se replier, un mouvement amorcé depuis le premier tour. Il s'est resserré à l'ouverture au plus bas depuis la mi-décembre 2016, avant de s'écarter à nouveau légèrement pendant la séance.

Bonne dynamique en zone euro

«Fondamentalement, on est dans une dynamique aussi bien macroéconomique et microéconomique qui apparaît plus favorable pour la zone euro» maintenant que le risque politique français est levé, a souligné auprès de l'AFP Jérôme Tavernier, directeur de la gestion collective chez VEGA IM, citant notamment les chiffres du PIB du premier trimestre, le meilleur moral des chefs d'entreprises ou encore la politique de la BCE qui commence à porter plus nettement ses fruits.

Avant l'ouverture des Bourses européennes, l'Asie avait également accueilli la victoire d'Emmanuel Macron avec un enthousiasme mesuré. Tokyo a fini sur un bond notable de 2,31%, avec un indice Nikkei au plus haut depuis fin 2015, mais d'autres éléments que l'élection française sont entrés en ligne de compte.

Du côté des autres marchés de la région, la Bourse de Hong Kong a terminé en hausse, tandis que Shanghai et Shenzhen finissaient en recul.

Même tonalité sur le front des devises: peu après l'annonce du verdict des urnes, l'euro est brièvement monté à 1,1023 dollar dimanche, un niveau inédit depuis novembre, et jusqu'à 124,59 yens, son cours le plus élevé en un an.

Mais la monnaie unique européenne est rapidement retombée sous la barre des 1,10 dollar et des 124 yens. Vers 12h15, elle valait 1,0928 dollar et 123,33 yens.

Désormais, «la grande question est: dans quelle mesure Macron va-t-il obtenir une majorité aux législatives du mois prochain?», a jugé Phil Borkin, économiste de la banque australienne ANZ.

«L'élection présidentielle posait vraiment un risque systémique de premier ordre pour la survie de l'Europe allant bien au-delà de la France, l'élection législative pose davantage un risque de mise en oeuvre de l'agenda de M. Macron», a estimé auprès de l'AFP Isabelle Mateos y Lago, directrice générale au BlackRock Investment Institute.

«À court terme, si Emmanuel Macron n'obtient pas de majorité, ce n'est pas très grave puisqu'on a effectivement ce cycle économique fort qui va soutenir la reprise, par contre à moyen et long terme, ce serait beaucoup plus inquiétant», a-t-elle observé.