Fairfax Financial Holdings a-t-elle vraiment l'intention de racheter BlackBerry? C'est ce que l'on saura lundi, alors que le fonds du milliardaire canadien Prem Watsa exercera - ou non - son droit d'achat sur le fleuron de Waterloo.

Réputé être le roi des causes perdues, Watsa, 63 ans, est aussi un émule du grand financier américain Warren Buffett, de 20 ans son aîné. Le fonds Fairfax a d'ailleurs plus d'une affinité avec le prestigieux fonds Berkshire Hathaway de l'Oracle d'Omaha, à commencer par un rendement annuel moyen exemplaire de 13% depuis 20 ans.

Comme Berkshire, dont le coeur est l'assurance de dommages (Geico) et la réassurance, les affaires de Fairfax s'articulent autour de l'assurance multirisque et de la réassurance. Ces conglomérats savent mettre à profit les énormes réserves requises par les assureurs pour faire face à d'éventuelles catastrophes.

Certes, la société de portefeuille torontoise n'a pas de chemins de fer et ne s'entiche pas de journaux régionaux, mais on trouve dans son organigramme le genre d'entreprises au profil clair, comme l'alimentation de bétail (Ridley) ou les services funéraires (Arbor Memorial). «Comme Berkshire Hathaway, ils cherchent à se concentrer sur le long terme», commente Colin Stewart, de la firme torontoise JC Clark Advisor.

Des sauvetages payants

De même que Berkshire a soutenu financièrement Goldman Sachs au coeur de la crise financière en 2008, Fairfax est allée à contre-courant en se portant au secours de la Bank of Ireland en 2011. Les actions de la banque irlandaise ont plus que doublé de valeur depuis son sauvetage.

Le sauvetage du joyau canadien de la haute technologie par l'homme d'affaires d'origine indienne n'est d'ailleurs pas plus désintéressé que la relance de la banque irlandaise ou son incursion récente dans les centres commerciaux grecs. Sa lettre d'intention, selon des observateurs, n'est qu'une offre d'attente qui établit un calendrier et un prix plancher pour presser d'autres acquéreurs éventuels qui pourraient encore se manifester en fin de semaine.

Fairfax a déjà engagé près de 400 millions dans l'aventure et est le principal actionnaire de BlackBerry, à hauteur de 10%. La réalisation de l'offre à 9$US par action lui coûterait 4,7 milliards de plus pour mettre le grappin sur des brevets évalués à 2 milliards, plus une cagnotte de 2,6 milliards. Une baisse du prix offert n'est d'ailleurs pas à écarter, en l'absence d'une surenchère.

Le cas où un autre acquéreur se manifesterait et égalerait son offre d'ici lundi vaudrait par ailleurs à Fairfax un dédommagement de 157 millions, 262 millions si le repreneur se manifeste tardivement. Ceci, évidemment, en plus du produit de la revente de son propre lot d'actions de BB acquises au prix moyen de 17$ pièce.

Aux dernières nouvelles, les fondateurs de BlackBerry préparent avec la firme d'investissement américaine Cerberus Capital Management une proposition d'achat concurrentielle. Les noms de Google, Intel, LG, Samsung et Lenovo ont aussi circulé pour des offres en tout ou en partie.

- Avec Bloomberg et PC