«O.K., c'est un peu bizarre», admet d'emblée Tom Astle, chef de la recherche de la firme torontoise Byron Capital Markets, qui risque la comparaison entre deux entreprises, dans deux industries distinctes, avec des produits-clés à des stades de développement différents: Research In Motion (T.RIM), qui présentera demain au monde entier son BlackBerry 10 (BB10), et Bombardier (T.BBD.B), qui procédera aux premiers vols d'essai de la CSeries l'été prochain.

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Ces deux entreprises ont tout de même ce point commun après avoir engagé respectivement 3 milliards et 4 milliards de dollars dans leur dernière création: «Ça passe ou ça casse.» Les paris se prennent à la Bourse de Toronto, où ces deux titres marquent des gains substantiels depuis le début de l'année. RIM a gagné 50% jusqu'à maintenant et Bombardier, 9%.

«Si vous êtes un investisseur dans de grandes entreprises en croissance au Canada et que vous voulez miser sur des moments très critiques, vous avez ces deux choix», écrit Tom Astle. Son collègue Shilpi Pasricha et lui se targuent d'être probablement les seuls analystes qui couvrent à la fois ces deux titres en vue, d'où «un champ d'expertise unique ou peut-être juste saugrenu».

Leur conclusion: 2013 est l'année de RIM tandis que Bombardier fera mieux en 2014-2015.

Selon Byron, RIM bat Bombardier dans 14 points sur 21. En outre, la date de lancement du BB10 est bien arrêtée alors que celle de la CSeries peut encore être retardée. RIM vend des téléphones à 500$ à un public accro alors que Bombardier doit convaincre des compagnies aériennes toujours fauchées d'acheter ses avions à 50 millions pièce. De plus, le BB10 devrait renflouer la caisse de RIM dès cette année tandis que Bombardier ne rentabilisera pas son investissement avant 2016. Autre plus: RIM peut compter sur d'éventuels partenaires comme Samsung, Lenovo, Microsoft, Amazon et Sony, tandis que Bombardier n'a que la Commercial Aircraft Corporation of China comme alliée possible. Le bilan de RIM est aussi plus enviable et les marges de profit sont meilleures dans l'industrie des téléphones.

Bombardier marque toutefois des points sur RIM en ce qui a trait notamment à sa diversification, la durée de vie de son produit (20 ans plutôt que 2), son carnet de commandes de 7 milliardset sa part du marché, soit 50% des avions commerciaux de moins de 150 sièges, alors que RIM n'a plus que 5% du marché des téléphones intelligents. Le secteur de l'aéronautique est surtout bien moins concurrentiel que celui des communications.

Magnanime, le chef analyste de Byron accorde un point au BB10 de RIM en tant qu'objet le plus désiré et un autre à la CSeries de Bombardier comme objet le plus désirable.