La génétique d'un investisseur peut le prédisposer à prendre plus de risques, mais pas nécessairement à améliorer son sort en Bourse, selon une nouvelle étude de l'Université Harvard.

> Suivez Vincent Brousseau-Pouliot sur Twitter

Selon l'étude publiée plus tôt ce mois-ci, les hommes ayant une forte concentration de dopamine dans leur bagage génétique ont tendance à prendre plus de risques. À l'inverse, ceux avec une faible concentration de ce neurotransmetteur redoublent généralement de prudence dans leurs décisions.

D'autres études sur le sujet étaient arrivées à la même conclusion, mais les chercheurs de Harvard et de l'Université Binghamton à New York ont poussé la réflexion plus loin. Ils ont demandé à leurs sujets - 237 joueurs de bridge qui ont participé au championnat national nord-américain en 2008 - de prendre une série de décisions au bridge ainsi qu'une décision financière. Résultat: les hommes avec une forte concentration de dopamine ont pris plus de risques, mais pas toujours pour le mieux. À concentration de dopamine égale, les joueurs de bridge les mieux classés sont parvenus à mieux évaluer les risques en jeu, tandis que les autres moins bien classés ont pris autant de risques sans en récolter les mêmes dividendes.

«La leçon pour les gens, c'est qu'ils doivent connaître à la fois leur propension génétique à prendre des risques et leur capacité à prendre des bonnes décisions dans un domaine donné. Ce n'est pas tout de prendre des risques. Il faut distinguer les bons risques des mauvais risques», dit Richard Zeckhauser, professeur d'économie politique à l'Université Harvard, en entrevue à La Presse Affaires.

Selon le professeur, un investisseur intelligent doit connaître à la fois son bagage génétique et son degré de connaissance des marchés boursiers. «Quelqu'un qui est disposé à prendre beaucoup de risques mais qui ne connaît pas la Bourse doit le savoir et s'ajuster, dit-il. Le contraire est aussi vrai: un investisseur dont le bagage génétique incite à la prudence mais qui prend généralement des bonnes décisions en Bourse doit se faire confiance. Beaucoup de gens ne prennent pas assez de risques en Bourse. Ils laissent leur argent dans leur compte d'épargne à un quart de pour cent en intérêts, ce qui n'a aucun sens à mon avis.»

L'essentiel des conclusions de l'étude de Harvard se base sur les résultats obtenus au bridge. Pourquoi avoir choisi le jeu préféré du célèbre investisseur Warren Buffett, surnommé l'Oracle d'Omaha? «Le bridge mesure la capacité à évaluer et prendre des risques, dit Richard Zeckhauser, lui-même un ex-champion américain de bridge. C'est une excellente préparation pour devenir homme d'affaires ou investisseur.»

Fait étonnant: l'étude n'a montré aucune corrélation entre la dopamine et la prise de risques chez les femmes. «Ça m'a surpris», dit Richard Zeckhauser.