Si Québec veut poursuivre la construction de la route des monts Otish, dont les coûts ont explosé de 60%, il faudrait renégocier l'entente qui fait porter tous les dépassements de coût sur les épaules de l'État, affirme le directeur général de Nature Québec, Christian Simard. «Il faut arrêter l'hémorragie de fonds publics!»

Québec construit actuellement un nouveau tronçon de 243 kilomètres de la route 167, au nord de Chibougamau, jusqu'au projet de mine de diamant de Stornoway Diamond Corporation. Le coût annoncé à l'été 2011 était de 332 millions, dont 44 millions (13% des coûts) à la charge de la société minière.

Le gouvernement a annoncé la semaine dernière que les coûts estimés sont désormais de 471 millions, dont 65 millions en imprévus, pour un chantier dont plus de la moitié des travaux restent à faire. Mais la part de Stornoway au budget ne bouge pas, quoi qu'il arrive. Elle ne représente donc plus que 9% du coût total.

C'est trop peu pour Christian Simard, dont l'organisme Nature Québec avait déjà déclaré que l'État prenait un trop grand risque en construisant une route pour Stornoway - même si Investissement Québec détient environ 35% de la société et que la route aurait d'autres usages. La hausse des coûts de la route ne vient qu'accentuer cette évaluation du risque.

«Improvisation»

Christian Simard se rappelle de la première évaluation des coûts de la route des monts Otish, dans le budget provincial de mars 2009. Il était question de 260 millions, dont 130 millions fournis par le secteur privé. Ce n'est plus du tout le même portrait aujourd'hui.

L'autre société minière qui pourrait profiter de la route à moyen terme et fournir une contribution pour la construction est Ressources Strateco. Mais son projet d'uranium Matoush fait face à une forte opposition des Cris. «Le projet Matoush est mort, il ne peut pas se faire», tranche M. Simard.

Selon Christian Simard, toute cette situation «illustre bien l'improvisation du Plan Nord».

«Un temps d'arrêt est nécessaire», affirme-t-il. «Il faut se demander si c'est le bon choix» d'aller de l'avant au bénéfice d'un projet minier qui, selon lui, ne peut être viable sans cette route construite en grande partie aux frais de l'État.

À tout le moins, si la construction se poursuit, Québec doit renégocier l'entente qui limite à 44 millions la part de Stornoway Diamond, dit M. Simard.

650 millions en retombées directes

Le vice-président aux affaires publiques de Stornoway Diamond, Ghislain Poirier, s'est dit surpris par le nouveau budget de la route 167, même s'il avait été informé de certains problèmes ayant causé des dépenses supplémentaires. Il confirme que la part de Stornoway reste à 44 millions, et que Stornoway déboursera environ 1,2 million par année pour l'entretien.

Selon M. Poirier, la société fait tout ce qu'elle peut pour offrir son aide au ministère des Transports afin de limiter les coûts de la route.

Stornoway est actuellement en processus de financement pour son projet de 800 millions. Elle espère qu'un lien carrossable jusqu'à la mine soit complété dans la deuxième moitié de 2013 pour commencer la construction de la mine.

Le projet Renard engrangerait pour Stornoway des profits nets de 376 millions (après impôts) sur la durée de vie de 11 ans prévue dans l'étude de faisabilité de novembre 2011. Durant ces 11 années, l'État retirerait environ 650 millions en impôts fédéraux et provinciaux, en droits miniers, de même qu'en redevances spéciales à Investissement Québec.

La société estime toutefois que la mine pourrait durer au moins 20 ans, sur la base des autres ressources découvertes sur la propriété Renard.

Les Cris de Mistissini sont favorables au prolongement de la route 167, qui faciliterait leur propre accès à leur territoire traditionnel.