Aussi improbable qu'il puisse être, l'intérêt de Michel Juneau-Katsuya pour les chantiers maritimes de Lévis n'est pas soudain. L'ex-agent secret s'intéresse à l'entreprise depuis 2005, lorsqu'il a soumis une première offre d'achat qui a été rejetée.

Tout indique qu'un nouveau processus d'appel d'offres sera mis en place pour trouver un autre repreneur pour la Davie. Michel Juneau-Katsuya sera sur les rangs, à la tête du même groupe d'investisseurs qu'il y a sept ans.

«Le Canada est assis sur un joyau qui est très mal exploité», explique-t-il au cours d'un entretien avec La Presse Affaires. Les pays qui ont une cale sèche de cette envergure au bord d'une voie maritime comme le Saint-Laurent se comptent sur les doigts d'une main, selon lui.

C'est la raison pour laquelle le groupe d'investisseurs qui s'intéressait au chantier en 2005 s'y intéresse toujours. À l'époque, ils avaient 54 bateaux à faire construire, ce qui a été fait en Asie. Ils reviennent avec une soixantaine de nouvelles commandes, vraquiers, caboteurs et navires de transport de matériel roulant (RO-RO), précise Michel Juneau-Katsuya.

Celui qui pilote ce groupe d'investisseurs veut que le chantier de Lévis passe de la fabrication sur mesure à la fabrication en série, pour être plus concurrentiel. Il n'y pas autant d'écart qu'on le croit entre les coûts de main-d'oeuvre ici et en Corée, soutient-il.

Le groupe affirme avoir non seulement les contrats, mais aussi le financement nécessaire pour les réaliser. «Nous ne demandons pas un sou en fonds publics», affirme Michel Juneau-Katsuya.

Soixante navires, de quoi donner du travail à 4000 personnes, un tel projet devrait être de la musique à l'oreille du syndicat des travailleurs du chantier, pratiquement paralysé depuis 28 longs mois. Mais les ex-travailleurs en ont vu d'autres.

«C'est gros», se contente de dire le président du syndicat, Paul-André Brulotte. Celui qui a passé 47 ans à la Davie aimerait bien que les activités du chantier soient relancées quand il prendra sa retraite, sous peu. Mais il a appris avec le temps et les nombreux propriétaires qui se sont succédé à ne pas s'enthousiasmer trop vite.

Pas d'engouement

Michel Juneau-Katsuya, de son côté, estime que le chantier aurait pu redémarrer rapidement si l'actuel propriétaire du chantier, Upper Lake Group, avait accepté de négocier directement avec son groupe plutôt que d'aller, encore une fois, tester l'intérêt du marché.

L'ancien officier de renseignement rappelle que personne ne s'est bousculé pour acquérir le chantier au cours des précédentes recherches pour trouver un repreneur.

L'actuel propriétaire du chantier, Upper Lake Group, s'était associé in extremis avec SNC-Lavalin et la firme sud-coréenne Daewoo pour acheter le chantier dans l'espoir d'obtenir une partie des contrats de navires fédéraux. Le consortium s'est défait quand aucun des contrats n'a été attribué à la Davie.