La grève n'a pas pu être évitée chez VIA Rail Canada. Comme prévu, les mécaniciens de locomotive et les chefs de triage, qui sont sans convention collective depuis le 31 décembre 2006, ont débrayé à midi, vendredi.

Tous les départs ont donc été annulés à compter de ce moment. Les négociations étaient depuis longtemps dans l'impasse entre la partie patronale et le syndicat, la Conférence ferroviaire de Teamsters Canada. Elles avaient repris lundi dernier avec le soutien d'un médiateur nommé par le gouvernement fédéral, mais avaient été rompues aux petites heures du matin, vendredi.

«On a déposé une offre finale dans la nuit, à 1 h 00, à la direction de VIA via le médiateur, a précisé en entrevue le porte-parole syndical Stéphane Lacroix. Cette offre n'a reçu aucune réponse. Ce matin (vendredi), il y avait une rencontre qui était prévue entre le médiateur, VIA Rail et le syndicat des Teamsters. Nous n'avons eu aucune réponse et, malheureusement, on se retrouve en grève.»

Représentant la direction de VIA, Malcolm Andrews a précisé que celle-ci avait aussi présenté pendant la nuit une offre globale et finale restée lettre morte, ajoutant que la rencontre amorcée au matin se poursuivait toujours en après-midi.

«Nous sommes déçus que le syndicat ait choisi de déclencher une grève», a-t-il répété à plusieurs reprises lors d'un point de presse tenu au beau milieu de la Gare centrale de Montréal.

Du côté syndical, on dit s'attendre à un long conflit.

«Si le passé est garant du futur, si on a négocié pendant deux ans et demi et qu'on en arrive à une grève, qui aurait pu facilement être évitée, je suppose que cette grève-là va durer un certain temps, a laissé tomber M. Lacroix. Les affectations d'équipage, les salaires, les avantages sociaux: ces choses-là n'ont pas été réglées.»

M. Andrews a pourtant affirmé que les choses avançaient.

«La dernière offre que VIA a déposée sur la table démontrait du mouvement côté monétaire, côté bénéfices et côté conditions de travail, a-t-il assuré. Cette offre globale était considérée comme très juste dans les circonstances.»

Un conflit qui a des conséquences

Ce sont donc des milliers de voyageurs, d'un océan à l'autre, qui doivent trouver d'autres moyens de locomotion.

En prévision de cet arrêt de travail, VIA Rail avait déjà annulé une multitude de départs de trains dans plusieurs grands marchés. Et il était prévu que l'ensemble du service soit interrompu dès le déclenchement de la grève.

À la Gare centrale de Montréal, en après-midi, tous les départs et arrivées affichés sur les tableaux indicateurs étaient en effet suivis de la mention «annulé».

En avant midi, Via Rail faisait encore tout en son pouvoir pour fournir d'autres moyens de transport, généralement des autocars, aux différents points où ses clients devaient prendre le train.

Mais depuis le déclenchement de la grève, il appartient aux voyageurs de se débrouiller. «VIÀ ne peut pas continuer à fournir des modes de transport de rechange, a indiqué Malcolm Andrews. Ce n'est tout simplement pas possible.»

Vendredi, les voyageurs de partout au pays et même d'ailleurs faisaient contre mauvaise fortune bon coeur et tentaient tant bien que mal de prévoir des solutions de rechange.

Par exemple, Dave Kyles, un touriste britannique, est arrivé au Canada jeudi avec l'intention de le traverser en train en 12 étapes. Il n'a entendu parler de la situation qu'au moment de vérifier les heures de départ à la gare d'Halifax, d'où il comptait partir pour Québec.

Comme plusieurs autres, M. Kyles ignorait toujours vendredi ce qu'il allait faire.

«(Le train) me semblait être une façon formidable de voyager et de voir du pays», a-t-il lancé avec regret.

Parti de Vancouver, Laurent Bernier retournait pour sa part chez lui à Québec quand il s'est retrouvé pris à Winnipeg. De là, il était prévu que VIA lui fasse prendre un avion jusqu'à Toronto, où il devait passer la nuit de vendredi à samedi, avant d'être placé sur un autre vol en direction de Québec.

M. Bernier semblait plutôt irrité.

«Je comprends qu'ils (les syndiqués) veulent une augmentation, mais ils n'avaient pas besoin de tout faire annuler», a-t-il déclaré.

M. Andrews n'était pas en mesure, vendredi, de chiffrer les pertes financières que VIA s'apprête à subir.

«Ces calculs ne sont pas encore faits, mais ce sera évidemment considérable, a-t-il reconnu. Nous transportons quelque 12 000 voyageurs par jour, à ce moment-ci de l'année.»

L'industrie du tourisme s'attend aussi à subir les contrecoups de cet arrêt de travail. Il faut dire qu'il survient durant les vacances d'été et que la récession économique fait déjà des ravages.

La ministre fédérale du Travail, Rona Ambrose, a fait savoir qu'elle était prête à nommer un arbitre afin de faciliter le règlement du conflit. Elle a exhorté les parties à poursuivre le dialogue.

Les trains de VIA qui assurent la liaison entre Sudbury et White River, en Ontario, ainsi qu'entre Victoria et Courtenay, en Colombie-Britannique, demeurent néanmoins en service, puisqu'ils sont exploités par un tiers.