Le gouvernement fédéral veut attirer les futurs Google et Facebook au pays grâce à un nouveau programme offrant la résidence permanente aux étrangers qui ont lancé des entreprises en démarrage. Le hic: ce programme n'est pas offert au Québec, qui a ses propres lois en matière d'immigration.

Québec et Ottawa ont confirmé à La Presse Affaires que le programme Startup Visa Canada (Programme de visa pour démarrage d'entreprise) n'est pas valide au Québec.

«Le Québec déterminant ses propres conditions d'immigration, le visa pour démarrage d'entreprise ne sera pas disponible à ceux qui envisagent de vivre au Québec», a expliqué Philippe Couvrette, porte-parole de Citoyenneté et Immigration Canada.

«Startup Visa Canada est un programme-pilote du gouvernement fédéral qui n'a pas d'impact sur nos programmes», a confirmé Jonathan Lavallée, porte-parole du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles du Québec.

M. Lavallée a précisé que, pour l'instant, Québec n'a pas l'intention de calquer le programme fédéral pour qu'il s'applique aussi au Québec.

«Le Québec est exclu et ça fait en sorte que le terrain de jeu n'est pas équitable, a dénoncé Jack Chadirdjian, président de Réseau capital - l'association du capital de risque au Québec. On déplore que ça n'ait pas été fait pour que le Québec puisse tirer profit du programme.»

«Nous sommes en discussion avec nos membres et les autorités gouvernementales pour voir comment, à l'intérieur du cadre réglementaire, on pourrait avoir des mesures similaires au Québec», a précisé M. Chadirdjian.

Un impact remis en question

En vigueur depuis lundi dernier, Startup Visa Canada vise les étrangers qui ont lancé des entreprises en démarrage. Ottawa leur offre la résidence permanente s'ils parviennent à obtenir du financement au Canada, auprès de fonds de capital de risque ou d'anges financiers. Le gouvernement a publié une liste d'investisseurs canadiens «autorisés», à qui les étrangers peuvent s'adresser.

Ce projet-pilote, d'abord offert pour cinq ans, est en fait calqué sur un programme qui avait été proposé aux États-Unis, mais n'y a finalement jamais été lancé.

Plusieurs observateurs s'interrogent cependant sur la portée qu'aura Startup Visa Canada.

«Je pense que les intentions sont bonnes, mais ce n'est pas de nature à engendrer un raz-de-marée d'investissements au pays, juge Maxime Godin, directeur, stratégie et performance, chez Raymond Chabot Grant Thornton. Les entrepreneurs qui ont de bonnes idées innovantes ne sont pas nécessairement à la recherche d'un endroit où immigrer... On semble viser un profil qui, à première vue, n'est pas évident à trouver.»

Le gouvernement fédéral a réservé 2750 visas par année pour Startup Visa Canada, ce qui semble élevé aux yeux de Chris Arsenault, associé principal d'iNovia Capital.

«Du point de vue des gens de capital de risque, si on a une centaine de visas par année, on va être contents», a dit M. Arsenault, dont le fonds figure dans la liste d'investisseurs auxquels les étrangers peuvent s'adresser pour bénéficier du programme.

«Conceptuellement, c'est une bonne idée. Combien de personnes parviendra-t-on à attirer avec ça? Ce n'est pas évident», se demande aussi Jacques Bernier, associé principal de Teralys.

Québec, qui ne possède aucune mesure d'immigration visant directement les entreprises en démarrage, affirme de son côté travailler à modifier ses programmes pour favoriser l'implantation des immigrants-entrepreneurs dans les régions du Québec.

Rappelons qu'à l'exception des travailleurs qualifiés qui répondent à des besoins urgents du Québec, le gouvernement provincial a suspendu l'acceptation de nouvelles demandes de la part d'investisseurs, d'entrepreneurs, de travailleurs autonomes et de travailleurs qualifiés étrangers jusqu'au 31 juillet, le temps de traiter les demandes déjà reçues et de revoir ses critères d'acceptation.

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COMMENT FONCTIONNE STARTUP VISA CANADA

1. Un entrepreneur étranger qui a lancé une entreprise en démarrage obtient l'appui d'un investisseur canadien. Ce financement doit atteindre 200 000$ s'il provient d'un fonds de capital de risque ou 75 000$ s'il provient d'un ange financier. Le fédéral a publié une liste de fonds et d'associations d'anges financiers approuvés pour le programme.

2. Le candidat doit démontrer une connaissance « intermédiaire» du français ou de l'anglais et prouver qu'il a terminé au moins un an d'éducation postsecondaire.

3. L'entrepreneur obtient sa résidence permanente et peut s'installer partout au Canada... sauf au Québec, où le programme ne s'applique pas.