Les turbulences s'accentuent chez la principale société aéroportuaire de Grande-Bretagne, BAA, où la Caisse de dépôt et placement du Québec a 1,8 milliard de dollars investis.

La dernière tuile: les offres obtenues par BAA pour la revente forcée de l'aéroport Gatwick, deuxième en importance à Londres, seraient très inférieures au montant attendu.

 

Au point où l'actionnaire majoritaire de BAA, le groupe espagnol d'infrastructures Ferrovial, a plongé en Bourse hier, au lendemain de la date limite, lundi, de l'appel d'offres pour Gatwick.

Selon des analystes et des médias financiers en Europe, les quelques offres reçues par BAA seraient de l'ordre de 1,4 milliard de livres (2,5 milliards CAN).

Un tel montant serait inférieur d'au moins 25%, ou quelque 500 millions de livres, au montant espéré par BAA et ses actionnaires, Ferrovial et la Caisse de dépôt.

Ils déclinaient tout commentaire, hier, en attendant la divulgation de l'offre retenue, dans quelques jours.

La revente forcée de Gatwick, faut-il rappeler, découle d'une récente ordonnance des autorités britanniques qui veulent réduire l'emprise de BAA sur le marché aéroportuaire de ce pays.

Selon des analystes, les offres inférieures obtenues par BAA reflètent l'impact de la récession sur le trafic de passagers à Gatwick, en baisse marquée.

Aussi, elles démontrent les difficultés de financement pour tout acquéreur potentiel, après une crise bancaire particulièrement sévère en Grande-Bretagne.

Selon le Financial Times de Londres, seulement deux groupes d'investisseurs ont présenté des offres pour Gatwick.

Un troisième tarderait après l'échec financier de son autre offre pour l'aéroport Midway, à Chicago.

Fait particulier pour la Caisse de dépôt: les deux groupes ayant déposé des offres pour Gatwick, selon le Times, impliquent des capitaux d'origine canadienne.

D'une part, la Banque Royale participe au financement de l'offre du fonds d'infrastructures GIP, dirigé par Credit Suisse et GE Capital. Le fonds GIP détient déjà le petit aéroport City au centre de Londres.

D'autre part, le fonds torontois Borealis Infrastructure, filiale de la caisse de retraite OMERS, est associé à un groupe de sociétés de services publics de la région de Manchester.

Par ailleurs, pour BAA et ses actionnaires, les offres inférieures aux attentes pour Gatwick surviennent à un mauvais moment.

Son principal actif, l'aéroport Heathrow de Londres, l'un des plus importants d'Europe, vient de subir sa première baisse de trafic de passagers après un demi-siècle de croissance continue.

De plus, cette baisse a été annoncée la semaine dernière avant la crise sanitaire de la grippe porcine, qui menace d'affecter le trafic aérien international.

Encore hier, des analystes soulignaient la vulnérabilité financière de BAA et sa dette de plus de 10 milliards de livres face à une baisse accentuée de ses revenus.

Même que, selon l'analyste Robert Crimes, de Credit Suisse à Londres, une baisse accentuée du trafic de quelques points de pourcentage aux aéroports londoniens de BAA pourrait provoquer un «bris de conditions» auprès de certains prêteurs.

Au siège social de BAA, hier, on a vite qualifié cet avis d'analyste de «spectaculairement hypothétique».

N'empêche, pour les actionnaires de BAA , le revers soudain de son volume d'affaires entache davantage la valeur de leur placement.

Il y a un an, l'inauguration de l'aérogare Cinq de l'aéroport Heathrow, élément-clé d'une expansion de 8 milliards US, a tourné au fiasco qui a duré plusieurs semaines. Et un «embarras national» dénoncé en plein parlement, à Londres.

Par ailleurs, la société BAA continue d'affronter une forte opposition locale à son projet d'une troisième piste à Heathrow.

Pourtant, de cette expansion majeure de la capacité d'accueil des avions dépend une partie des ambitions de BAA du point de vue de ses actionnaires.