L'annonce par Xerox de l'achat d'Affililiated Computer Services a relancé la rumeur que CGI soit la prochaine proie à être saisie par un concurrent. Après plusieurs mois de paralysie, les entreprises se reluquent de nouveau, et la saison de la chasse ne fait que commencer.

Les noms de plusieurs proies possibles refont surface. Il y a CGI, mais aussi SNC-Lavalin, qui n'a pas d'actionnaire de contrôle, ou World Color Press, l'ancienne filiale de Quebecor qui vient de reprendre vie après s'être restructurée à l'abri de ses créanciers.

Les transactions continueront de se multiplier au cours des prochaines semaines, croient les spécialistes sondés par La Presse Affaires. Les entreprises qui ont traversé la crise sans trop de mal se retrouvent avec beaucoup d'argent à dépenser, souligne Dominique Vincent, de MacDougall, MacDougall, MacTier.

La gestionnaire de portefeuille cite une étude de Standard&Poor's qui indique que les entreprises non financières du S&P 500 ont 700 milliards de comptant dans leurs coffres, ce qui est supérieur de 8% au niveau de l'an dernier et de 16% à celui d'il y a deux ans.

Les entreprises qui n'ont pas les coffres pleins s'affairent à les regarnir. «On a beaucoup de refinancement», indique Dominique Vincent.

Steve Goulet, de la Financière Banque Nationale, constate la même chose. «On a beaucoup plus d'émissions d'actions et certains (des émetteurs) ont des projets d'acquisitions».

L'activité sur le front des fusions et acquisitions a repris, mais elle loin d'avoir retrouvé le rythme trépidant d'avant la crise financière, souligne Jean-Paul Giacometti, vice-président de la firme de gestion de portefeuille Claret. «C'est une reprise par rapport à un arrêt complet qui a duré neuf mois.»

Selon Standard&Poor's, seulement deux secteurs d'activités ont vu une reprise notable du nombre de fusions et acquisitions, soit la santé et les services publics. Le nombre de fusions et acquisitions devrait peu à peu augmenter dans les autres secteurs, estime le stratège en chef de la firme américaine, Sam Stovall, si le climat économique continue de s'améliorer.

Secteur de l'énergie

Les chasseurs ne font généralement pas un mystère de leurs intentions. Des entreprises comme GLV Inc. ou Alimentation Couche-Tard ne cachent pas être constamment à l'affût. Les proies sont nécessairement plus discrètes.

C'est dans le secteur de l'énergie qu'on en retrouvera le plus grand nombre, croient la plupart des spécialistes interrogés hier.

«Si le prix du pétrole continue de descendre, les titres pétroliers vont faiblir et ce sera très tentant pour les étrangers de racheter nos entreprises», explique Denis Durand, de Jarislowski Fraser.

Denis Durand n'hésite pas à donner de gros noms comme Encana, Talisman ou Nexen, qui pourraient alors changer de propriétaires.

Selon lui, il serait surprenant que CGI fasse l'objet d'une prise de contrôle. «Il faudrait que Serge Godin accepte, puisqu'il y a des actions à droits de vote multiples, mais si le prix est là, c'est toujours possible», a-t-il dit.

La vente de World Color Press, par contre, ne serait pas une surprise pour lui, ni celle de Jean Coutu. «À la suite de l'aventure américaine, l'entreprise a moins de possibilité de croissance au Québec et pas de poids en Ontario», explique-t-il.

Le nom SNC-Lavalin refait périodiquement surface quand il est question de fusions et acquisitions. C'est que l'entreprise n'a pas d'actionnaire majoritaire, ce qui rend une éventuelle prise de contrôle plus facile. C'est vrai, estime l'analyste Pierre Lacroix, de Valeurs mobilières Desjardins.

Mais d'un autre côté, souligne-t-il, l'entreprise n'a pas été une cible lors de la dernière vague de fusions et acquisitions et il ne pense pas qu'elle le deviendra. «Pour moi, SNC-Lavalin continue d'être le chasseur plutôt que le chassé».