Les importations de la Chine ont enregistré une stabilisation-surprise en mai, témoignant d'une embellie de la demande du pays: un signal encourageant en dépit d'une conjoncture économique toujours morose et d'un plongeon des exportations.

Après avoir marqué le pas en avril, les exportations du géant asiatique, principale puissance commerciale de la planète, ont trébuché le mois dernier, chutant de 4,1% sur un an à 181,1 milliards de dollars, ont indiqué mercredi les Douanes chinoises.

En revanche, le tableau s'est éclairci de façon inattendue sur le front des importations: elles ont encore reculé en mai, pour le 19e mois consécutif, mais un repli de seulement 0,4%, à 131,1 milliards de dollars.

Ces chiffres sont scrutés de près pour jauger la santé de la deuxième économie mondiale: le commerce extérieur reste l'un des piliers du PIB chinois, en dépit des efforts de rééquilibrage engagés par Pékin.

Le nouveau plongeon des exportations, un peu plus marqué qu'attendu, reflète une demande extérieure toujours terne. Pourtant, exprimées en yuans, les exportations s'affichent en hausse de 1,2%.

Après huit mois consécutifs de recul et le sursaut enregistré après le Nouvel An chinois, les exportateurs chinois profitent d'un relatif gain de compétitivité grâce à la dépréciation continue de la monnaie chinoise.

Mais «il faudra attendre une reprise plus robuste aux États-Unis et en Europe (les deux principaux partenaires commerciaux de Pékin) pour assister à un rebond durable et solide des exportations chinoises», souligne Raymond Yeung, analyste de la banque ANZ.

Pour sa part, la quasi-stabilisation des importations est une franche surprise: les analystes sondés par Bloomberg tablaient en moyenne sur une nouvelle chute de presque 7%.

Le contraste est flagrant avec l'effondrement de presque 11% enregistré en avril. Exprimées en yuans, les importations rebondissent même de 5,1% en mai.

«Cela suggère une amélioration de la demande intérieure, mais reflète aussi la hausse des prix des matières premières, avec une remontée de 12% sur un mois des cours du pétrole», a observé Yang Zhao, expert chez Nomura.

L'acier, pomme de discorde

La reprise des cours des matières premières gonfle les montants importés, et cela devrait continuer d'être le cas sur les prochains mois, l'effondrement des prix en 2015 fournissant une base de comparaison favorable sur un an.

Toutefois, les volumes importés «résistent plutôt bien sur la période récente» et «fournissent une bonne idée de la demande» réelle, a commenté Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics.

L'appétit chinois s'est ainsi confirmé en mai: ses importations de cuivre ont grimpé de 19% sur un an, celles de pétrole brut se sont envolées de presque 39% et celles de charbon de 33%.

Le gouvernement a accéléré ces derniers mois ses efforts de relance budgétaire pour stimuler l'activité, en sus d'une politique monétaire toujours ultra-accommodante.

Ces mesures paraissent porter leurs fruits: l'activité manufacturière a légèrement progressé en mai, pour le troisième mois consécutif, tandis que les prix du marché immobilier continuent de bondir, confirmant le regain de santé du secteur crucial de la construction.

Mais dans l'ensemble, la conjoncture reste précaire: l'industrie est plombée par de massives surcapacités de production, l'envolée du crédit inquiète, les réformes structurelles piétinent, et la croissance continue de ralentir (+6,7% au premier trimestre).

«Avec une reprise concentrée sur les chantiers d'infrastructure et l'immobilier, les autorités vont être forcées de garder leurs mesures de soutien en place», en dépit de l'endettement élevé et des risques financiers, ont estimé des analystes du cabinet Bloomberg Intelligence, ce qui devrait continuer de porter la demande intérieure.

Le gouvernement s'efforce de rééquilibrer le modèle de croissance du pays vers les services, les nouvelles technologies et la consommation intérieure, mais la transition s'avère douloureuse.

Dans le secteur de l'acier, la pression s'intensifie sur la Chine, que les États-Unis ont rappelé à l'ordre cette semaine, l'enjoignant de sabrer les colossales capacités excédentaires de ses sidérurgistes.

Les exportations d'acier de la Chine ont encore gonflé en mai, grimpant de 2,4% sur un an à 9,42 millions de tonnes, de concert avec un bond de 22% sur un an des importations chinoises de minerai de fer --ingrédient clé de l'acier--.

L'excédent commercial chinois a gonflé à 50 milliards de dollars, contre 45,5 milliards en avril.