Les Français vont être soumis en 2013 à une cure de rigueur historique pour ramener le déficit public à 3% du PIB, au prix d'un effort de 36,9 milliards d'euros dont 24 milliards de hausses d'impôts, selon le projet de budget présenté vendredi.

Un tel effort, «le plus important depuis 30 ans» selon François Hollande, depuis toujours selon les économistes, sera «inédit» en période de croissance très faible et de chômage élevé.

Évoquant un projet «porteur de redressement», le président de la République, cité vendredi par la porte-parole du gouvernement Najat Vallaud-Belkacem, a estimé que «un budget n'est rien s'il n'est pas accompagné d'une volonté politique».

C'est «un budget de combat pour la justice sociale, un budget de combat pour la croissance, la préparation de l'avenir», a déclaré le premier ministre Jean-Marc Ayrault à la sortie du Conseil des ministres. La veille, il avait affirmé vouloir «dire stop à la dérive des déficits et de la dette».

Le ministre des Finances Pierre Moscovici a réaffirmé l'engagement de la France à réduire le déficit, de 4,5% cette année à 3% l'an prochain, en invoquant «la crédibilité du pays». «Les 3%, c'est ce qui permet d'inverser la courbe de la dette en 2014 et je veux être le ministre du désendettement», a-t-il déclaré.

L'objectif du président François Hollande d'un retour à l'équilibre des finances publiques en 2017 est cependant abandonné: le gouvernement prévoit encore un déficit à 0,3% du PIB à cette date. Bercy a toutefois souligné que le déficit zéro serait atteint dès 2016 en termes «structurels», conformément au nouveau traité européen en cours de ratification.

Le budget auquel s'ajoute le projet de budget de la Sécurité sociale qui sera présenté lundi et qui tient compte des hausses d'impôts votées en juillet est bâti sur une prévision de croissance à 0,3% cette année, 0,8% en 2013, et 2% les années suivantes.

«Inverser la courbe de la dette»

Il prévoit un total de prélèvements obligatoires à 46,3% du PIB. Mais ceux-ci devraient baisser à partir de 2016 après avoir connu un sommet en 2015, à 46,7%.

Les hausses d'impôts concernent les «ménages les plus aisés» et les grands groupes. Il s'agit, a assuré M. Moscovici devant la commission des Finances de l'Assemblée nationale, de «préserver le pouvoir d'achat des ménages, en particulier celui des ménages les plus modestes». Le gouvernement cherche aussi à épargner les PME et TPE, «génératrices de croissance et d'emploi».

Ainsi l'impôt de solidarité sur la fortune est renforcé, le plafond du quotient familial abaissé et la taxation des revenus du capital alignée sur celle des revenus du travail. La «progressivité» de l'impôt sur le revenu est élargie avec la création d'une nouvelle tranche à 45% par contribuable gagnant plus de 150 000 euros par part.

Un bouclier fiscal sera toutefois rétabli pour éviter que le cumul des impôts directs nationaux ne dépasse 75% des revenus d'un contribuable. Une taxe exceptionnelle à 75% sur la part des revenus excédant un million d'euros annuel est en outre créée pour deux ans, une mesure symbolique qui touche environ 1500 personnes.

Le gouvernement assure que les classes moyennes ne seront pas touchées par cette réforme mais omet de rappeler que le collectif budgétaire de juillet avait acté le gel du barème de l'impôt, une mesure touchant beaucoup plus qu'un foyer fiscal sur dix, même si les ménages non imposables et ceux des deux premières tranches bénéficieront d'une décote pour ne pas être affectés.

Côté entreprises, les mesures prévues par le gouvernement doivent permettre de «réduire de 30% l'écart de taux implicite d'imposition entre les PME et les grandes entreprises».

Troisième grand volet du budget, l'État s'engage à faire un effort de 10 milliards d'euros sur ses dépenses, en gelant ses effectifs, et en s'attaquant notamment aux excès des agences opératrices de l'État. En parallèle, le projet de budget prévoit des créations d'emplois dans les secteurs jugés prioritaires par le gouvernement, comme l'Éducation où plus de 10 000 postes d'enseignants sont annoncés. Ces créations seront «strictement compensées» ailleurs, selon Bercy.

Ce budget doit permettre d'«inverser la courbe de la dette», qui selon Pierre Moscovici a atteint «un seuil absolument critique» qui menace la croissance.

Selon les prévisions du gouvernement, la dette publique dépassera un nouveau record en 2013, s'établissant à 91,3% du PIB (64,2% en 2007), avant un reflux attendu en 2014. Comme en 2012, sa charge restera cette année encore le premier poste budgétaire de l'État, avant l'enseignement scolaire, réduisant encore les marges de manoeuvre pour mener des politiques économiques jusqu'en 2014.