Le sommet du G-20 à Séoul pourrait être plus agité que prévu. La décision de la Fed américaine d'injecter 600 milliards de dollars dans son économie a fait grincer des dents en Europe et au sein de puissances émergentes, comme la Chine. La crainte d'une «guerre des devises» reprend de l'ampleur.

À une semaine de la rencontre entre les dirigeants des plus grandes puissances économiques du monde et des forces émergentes, jeudi et vendredi, cette question des taux de change promet donc de dominer l'ordre du jour - et de porter ombrage aux autres dossiers.

L'enjeu est revenu au premier plan, plus tôt cette semaine, lorsque la Banque centrale américaine a annoncé son intention de racheter, d'ici la moitié de l'année 2011, 600 milliards $ de bons du Trésor. Les critiques ont fusé de toutes parts : « La politique des États-Unis n'a pas de sens », a chargé le ministre allemand de l'Economie, Wolfgang Schäuble.

La Chine s'en est pris la proposition de plafonner à 4 % du PIB l'excédent et le déficit des balances commerciales. Les États-Unis et le Canada approuvent cette approche, qui vise à contrer la sous-évaluation du yuan. Mais des pays comme l'Allemagne, l'Inde et la Russie s'y opposent.

« Bien sûr, nous espérons voir des comptes courants plus équilibrés, a précisé Cui Tiankai, vice-ministre des Affaires étrangères. Mais nous pensons que distinguer cette question et focaliser toute l'attention dessus ne serait pas une bonne approche. »

Ottawa derrière Washington

Le Canada a manifesté son appui aux États-Unis, hier, lors d'une séance d'informations à micros semi-fermés sur les sommets du G20 et de l'APEC. Le premier ministre Stephen Harper, en effet, profitera de sa visite en Asie pour assister également au sommet de la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique, qui se tient à compter de samedi à Yokohama, au Japon.

« Le fait que la Fed doive faire ce qu'elle vient de faire démontre l'importance de faire du progrès sur la question des devises, et de les rendre plus flexibles à travers le monde », a dit l'un des conseillers du premier ministre en matière d'économie, interpellant directement la Chine pour qu'elle continue à faire grimper la valeur de sa monnaie.

« Nous appuyons pleinement l'adoption d'une cible pour les comptes courants », a-t-il ajouté, refusant toutefois de s'avancer sur un pourcentage en particulier.

Dans une lettre envoyée aux leaders du G20, Stephen Harper a quant à lui appelé à une discussion franche sur les manières de réduire le déséquilibre des comptes courants. Rappelant que la reprise économique était fragile et inégale d'un pays à l'autre, il a mis en garde contre la tentation de faire cavalier seul.

Bâle, FMI, emplois...

Le premier ministre et ses conseillers ont néanmoins dit souhaiter que ces divergences d'opinion ne portent pas ombrage aux autres dossiers et avancées potentielles du sommet de Séoul.

Au niveau de la réforme des systèmes financiers et bancaires, les pays membres seront appelés à valider les recommandations du comité de Bâle en vue de renforcer la solvabilité et la liquidité des banques.

Ils confirmeront également la réforme du Fonds monétaire international, proposée en octobre, et qui verra ses réserves monétaires doubler, l'Europe céder deux sièges au conseil d'administration aux pays émergents, de même qu'un transfert de 6 % des droits de vote vers ces mêmes pays, des mesures qui devraient voir la Chine gagner en importance.

Les chefs d'État devront enfin s'attarder à d'autres questions importantes relatives à la reprise de l'économie : de la lutte au protectionnisme à la création d'emploi, en passant par l'offre alimentaire mondiale et les objectifs du millénaire pour l'aide internationale. Le Canada fera également pression pour que ses partenaires respectent leurs engagements pris au sommet de Toronto, en juin, dont celui de réduire leurs déficits respectifs de moitié d'ici 2013.

La menace de Pyongyang

Côté sécurité, la Corée du Sud a promis de déployer tous les effectifs militaires nécessaires pour s'assurer que tout se déroule sans danger, en plus d'un présence policière pouvant s'élever à 50 000 agents. Comme toujours, la menace terroriste demeure un enjeu, de même que les affrontements entre forces de l'ordre et manifestants.

Mais cette fois-ci, une autre menace pointe à l'horizon : celle de la Corée du Nord. Plus tôt cette semaine, le président sud-coréen, Lee Myung-bak, a expliqué qu'une manoeuvre venant de la Corée du Nord était sa plus grande inquiétude, mais qu'il ne croyait pas qu'elle allait se concrétiser. Le réseau Voice of America a rapporté que, par l'entremise d'un journal contrôlé par le parti au pouvoir, Pyongyang a qualifié les prétentions du président sud-coréen de ridicules, et qu'elles n'avaient pour seul objectif que de faire grimper les tensions dans la péninsule.

- Avec Reuters