La marée noire ne se propage pas seulement dans le golfe du Mexique. La fuite de pétrole a aussi atteint la Bourse de New York, où l'action de British Petroleum a perdu 17,0% de sa valeur depuis l'accident du 20 avril dernier. Une dégringolade de 32 milliardsUS en valeur boursière pour la pétrolière dont les assises financières restent toutefois solides.

«BP perdra éventuellement entre 30 et 40 milliardsUS de valeur boursière à cause de l'accident», dit Blake Fernandez, analyste boursier à la firme Howard Weil à La Nouvelle-Orléans en Louisiane, lors d'un entretien avec La Presse Affaires.

 

Les quatre analystes boursiers consultés par La Presse Affaires sont unanimes: le titre de BP n'a pas encore atteint le fond du baril. Hier à la Bourse de New York, il a clôturé la séance à 50,19$US, en baisse de 3,7%. «Je pense qu'il peut descendre jusqu'à 45$US, dit Philip Weiss, analyste à la firme Argus Research à New York. Si je voulais investir à long terme dans BP, j'attendrais encore un peu. Il y a encore trop d'incertitude autour du titre.»

Des quatre spécialistes de la Bourse, Blake Fernandez est de loin le plus optimiste pour British Petroleum. L'analyste de La Nouvelle-Orléans conseille toujours d'acheter le titre du propriétaire majoritaire (65%) de la plateforme pétrolière qui souille actuellement le golfe du Mexique. «Le titre de BP continuera d'être sensible jusqu'à ce que le problème soit réglé, mais il y a actuellement une occasion pour les investisseurs qui pensent le garder entre trois et cinq ans, dit l'analyste boursier. Avec un dividende de 7%, le titre de BP est très attrayant.»

Assises financières solides

Combien la catastrophe coûtera-t-elle à British Petroleum? Un milliard? Deux milliards? «On spécule jusqu'à 14 milliards, mais aucun chiffre n'a été confirmé», dit Blake Fernandez.

Peu importe le montant final de la facture, la pétrolière inscrite aux Bourses de Londres et de New York pourra l'absorber facilement. En 2009, elle a généré un bénéfice net de 16,6 milliards US sur des revenus de 246,1 milliards US. Elle est aussi assise sur une réserve de sept milliardsUS.

«BP peut absorber ce coup sur le plan financier, car les finances de la société sont en bon état. Sa dette est relativement peu élevée, résultat des prix élevés du pétrole au cours des dernières années», dit Brian Purdy, analyste du secteur de l'énergie à la Financière Banque Nationale.

«C'est une entreprise solide financièrement. Avec son dividende, c'est un bon investissement à long terme», dit Brian Youngbert, analyste à la firme Edward Jones à Saint-Louis.

Pas encore sur la liste noire

Malgré l'ampleur de la fuite de pétrole - qui pourrait devenir la catastrophe écologique la plus importante de l'histoire des États-Unis si on ne parvient pas à stopper la fuite -, les firmes d'investissement responsables hésitent avant d'inscrire British Petroleum sur leur liste noire.

«Il ne faut pas nécessairement délaisser son investissement dans BP, qui a fait certains efforts environnementaux même si son plan d'urgence n'était visiblement pas adéquat. BP s'est aussi engagée à payer tous les coûts engendrés par la fuite, ce qui est plutôt rare de la part d'une pétrolière. Tout ce qu'on sait pour l'instant, c'est qu'il s'agit d'un accident. Nous leur donnons encore le bénéfice du doute», dit Olivier Gamache, PDG de Groupe investissement responsable, une firme montréalaise qui conseille les investisseurs au plan éthique et environnemental.

Parmi les pétrolières, British Petroleum a plutôt bonne réputation dans le milieu de l'investissement responsable. «Ce n'est pas une compagnie si pire que ça, dit Olivier Gamache. Elle accorde de l'importance au dialogue avec les investisseurs et aux questions d'investissement responsable. Elle peut toujours mieux faire, mais il n'y a pas nécessairement de raison pour délaisser son investissement dans BP.»

 

1,5 milliard US

Le coût de la marée noire dans le golfe du Mexique pourrait se situer entre 1 et 1,5 milliard US pour les assureurs et réassureurs mondiaux, selon plusieurs estimations établies par des réassureurs impliqués dans la catastrophe.

Le réassureur bermudien Partner Re a jugé, dans un communiqué, que la somme à la charge des assureurs était potentiellement supérieure à 1 milliard US, tandis que son homologue américain Transatlantic Re a chiffré les pertes à 1,5 milliard US.

L'entreprise la plus exposée potentiellement est Jupiter, filiale de la société pétrolière britannique BP, exploitant de la plateforme dont la destruction a causé la marée noire.

À titre de comparaison, Swiss Re avait évalué le coût pour les assureurs des dégâts provoqués par le séisme au Chili en février entre 4 et 7 milliards US.