Après avoir claqué la porte de l'Ouest canadien parce qu'elle y jugeait l'industrie pétrolière «réfractaire» à l'adoption de ses technologies, la société montréalaise Prosep sent enfin les mentalités changer. Et veut maintenant refaire sa conquête de l'Ouest en bonne et due forme.

Prosep, qui vend aux pétrolières des systèmes capables de séparer le pétrole de l'eau et du gaz, a raflé jeudi dernier son plus important contrat en carrière auprès des exploitants des sables bitumineux de l'Alberta. L'entreprise a vendu un système de séparation pour 2 millions de dollars à une «grande société pétrolière» dont le nom n'a pas été dévoilé.

Le président et chef de la direction de Prosep, Jacques Drouin, souhaite que ce contrat soit le premier d'une longue série.

«On est en train de sérieusement repositionner une partie de l'entreprise vers l'Ouest canadien», a confié M. Drouin à La Presse Affaires lors d'une entrevue téléphonique.

Le contrat annoncé jeudi a été décroché grâce à une alliance commerciale avec une firme d'ingénierie d'Edmonton, Thermo Design, qui pourrait en faire débouler d'autres. Mais Jacques Drouin affirme que Prosep pourrait aussi carrément réaliser une acquisition dans l'Ouest.

L'entreprise est bien consciente de la taille du marché et rappelle que les sables bitumineux albertains représentent la deuxième réserve de pétrole du monde après l'Arabie Saoudite.

Conquête de l'Ouest, prise deux

Prosep avait pourtant déjà testé le marché de l'Ouest il y a une demi-douzaine d'années, mais sans grand succès.

«La dernière fois qu'on était allés là, on s'était un peu cassé les dents. Pour ce qui est des nouvelles technologies relatives au traitement de l'eau, l'Ouest canadien est l'un des endroits les plus conservateurs du monde», dit M. Drouin.

Prosep avait réalisé une importante acquisition en Norvège en 2007 et avait plutôt choisi de se tourner vers ce marché, plus ouvert à la nouveauté.

«À l'époque, j'avais dit: nous sommes une petite entreprise, nous devons aller là où les fruits sont les plus mûrs. Allons en Norvège et en mer du Nord, et on reviendra dans l'Ouest canadien quand ce sera opportun. Je pense qu'on y arrive», dit M. Drouin.

Selon lui, une combinaison de facteurs parmi lesquels figurent la récession, la prise de conscience des dégâts environnementaux causés par l'eau de production utilisée pour l'extraction des sables bitumineux et l'accident de BP dans le golfe du Mexique sont en train de faire changer les mentalités dans l'Ouest.

«Total et Statoil sont des entreprises européennes qui commencent à prendre beaucoup de poids dans l'Ouest. Et ce sont des entreprises qui ont une culture, sans dire respectueuse de l'environnement, disons plus sensible aux enjeux environnementaux», souligne aussi M. Drouin.

Pour l'instant, l'entreprise montréalaise n'a pas la prétention de changer le monde. Le système qu'elle vient de vendre n'a «pas de lien avec la pollution. Ça a un lien avec la production», dit M. Drouin.

Mais le grand patron croit que ses technologies, capables de retirer le pétrole des eaux de production, pourraient ultérieurement aider à rendre l'extraction des sables bitumineux moins polluante.

Le titre de Prosep a clôturé à 10 cents à la Bourse de Toronto vendredi, inchangé par rapport à son cours de la veille.